Il a toujours cette tendance à
plonger son romantisme dans le désespoir. Il espère que cela le rendra plus
beau, encore plus définitif. Il navigue dans les vapeurs de l’adolescence, ce
qui peut le rendre plus touchant, du moins pendant un certain temps. Il ne faut
pas s’y tromper. Il a déjà été heureux. Il a déjà aimé. Il a déjà été aimé. Ce
qu’il n’a pas encore écrit, mais il lui reste plusieurs heures pour le faire,
c’est qu’il garde en lui cette sensation de ne jamais s’être laissé aller à
l’amour, de ne jamais s’être offert sans réserve. Avec elle, il savait qu’il
allait y parvenir. Au début, c’était en pointillé. Il s’offrait des voyages,
des séjours dans la marge. Il était en quelque sorte un intermittent du
laisser-aller sentimental.
« Je ne sais pas comment d’un
presque rien est né ce furieux besoin d’aimer. La passion m’a toujours été
étrangère, ce qui en soi n’est pas une tare. Mais j’éprouvais, peut-être à
nouveau, ce besoin d’être heureux, de ressentir. Certainement détecté par des
capteurs d’une extrême sensibilité, je découvrais que cette réciproque histoire
de cul n’en était plus tout à fait une. Je l’ai découvert le jour où la tenir
simplement dans mes bras me suffisait. Je vivais ce moment. Tout ce qui me
constituait, tout ce qui faisait que j’étais moi était là en train de la
serrer, de la respirer. C’était comme si nos cellules, nos atomes cherchaient à
se mêler. Je n’ai pas eu peur. »
« Je ne sais pas pourquoi, mais
cela me rappelle la plage. Je n’ai jamais aimé me prélasser sur le sable. Je ne
peux rien y faire, même pas penser. C’est le lieu de l’inconfort, de la
vacuité, du néant, de la négation. Tous ces grains ne m’inspirent rien.
Pourquoi en vouloir à cette plage par ailleurs tant prisée, tant espérée ?
Ce sont les vagues qui m’attirent. Les vagues qui grondent, qui m’imposent leur
énergie. Je m’avance vers elles à la recherche de celle qui m’emportera, me
submergera, à laquelle je n’opposerai aucune résistance. Je deviens un
ingrédient de cette soupe agitée. Je n’ai plus de point de repère. Et puis,
comme un chat qui en aurait assez de jouer avec sa proie, la vague me rejette
sur le sable. Etourdi, heureux d’être sain et sauf, je passe la langue sur mes
lèvres mouillées pour contenter tous mes sens. »
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