vendredi 31 octobre 2014

Est-ce

Toujours sans cesse.
Je discerne le battement.
Lorsque le souvenir est une caresse
Qu'il remonte profondément
Dans les flots qu'il délaisse
Il échoue dans l'écume de lumière
Le tourment le laisse
S'évaporer dans la chaleur des pierres.

jeudi 30 octobre 2014

De retour

Hendaye. J'ose le dire, il n'y a qu'Hendaye qui vaille. Qui vaille à l'âme et au corps. 25° à l'ombre et pourtant libre. Libre de plonger dans les rouleaux sans se décoiffer. Libre de se laisser emporter par la houle qui vous transporte et vous rejette sur le sable. Sur le sable et pourtant riche des rayons dorés d'une chaleur qui vous donne envie. Envie d'y retourner et de se laisser porter par le goût du sel et disparaître dans l'écume du mouvement. Pour cela, il suffit de se laisser glisser jusqu'à l'océan depuis les hauteurs d'Urrugne. 

Musique

Hier soir. Déjà. Hier soir donc, je suis allé voir et écouter Christine and the Queens. J'y suis surtout allé pour the Queens. Autant vous dire que j'ai été déçu. Non. J'y suis allé comme accompagnateur. Sympathique, généreuse, souriante, belle voix, aisance corporelle qui se déploie sur toute la scène. Elle n'a pas en moi suscité un enthousiaste renversant. Pour autant, la soirée fut agréable.
En revanche, les addicts, les greffés, les casse-couilles du smartphoooone ne se lassent pas de polluer l'espace. Faut-il qu'ils aient l'esprit aussi étroit que l'écran de leur portable pour qu'une partie de la soirée ils le tiennent à bout de bras afin de capter en tout petit ce qui s'offre grandeur nature à leurs yeux. Faut-il que maintenant ne soit consacré qu'à l'après?
Voilà, j'ai fini de grogner.    

samedi 18 octobre 2014

Point de vue

Sur les hauteurs de l’air apparaît la transparence des lointains. Le regard transperce l'horizon. Les forces s’arrachent à la pesanteur. L’élan des pointes découpe la vision. Ralentie par le froid la lumière peine à accompagner le jour. Déterminé, le temps s'en étonne pourtant. Une envie de se jeter dans le vide pour ressentir les restes d'une éternité. Plonger dans la morsure de l'air pour que maintenant se rapproche.

jeudi 16 octobre 2014

Celui d'après

Le couloir dans lequel je m'engageai se prolongeait dans la pénombre. De chaque côté, des cabines aux portes de bois peintes en bleu. J'avançai encore. Encore un peu. Sans vraiment choisir, j'entrai dans l'une d'elle. Quels auraient pu être les critères de ce choix? Une fois la porte refermée, j'ôtai mes vêtements avec un soin inhabituel. Je marquai un temps avant la nudité totale et finis par laisser glisser le dernier élément de tissu. Une relative absence de lumière ne me permettait pas de m'observer. De façon assez prévisible, je ressentis une certaine liberté. Peut-être même de la légèreté. Je n'étais rien que ce que j'étais. Je devais en sourire. Comme si nous étions deux dans ce carré préventif. L'un de nous deux était heureux pour l'autre qui sans pudeur s’exhibait. Je n'étais encore jamais parvenu à être un adepte du corps masculin. Je lui trouvais quelque chose de superflu. Je ne m'autorisais que la fréquentation de mon propre corps. 

mardi 14 octobre 2014

Reflet

Ce matin je l'ai senti. Avant même d'arriver dans la salle de bain. Je suis persuadé que les racines se trouvaient au plus profond de ma nuit. Une sensation familière que j'hésitais à qualifier. Outre que j'aime bien hésiter, il m'arrive de ne pas trouver les mots ou, plus modestement, le mot. Je me suis regardé dans la glace histoire de me dire quelque chose. Du style "Alors mon gars..." avec l'espoir, même ténu, de me faire sourire. Il ne m'a fallu que l'espace des trois petits points pour me rendre à l'évidence que ce serait peine perdue. Celui que j'avais en face de moi était en dessous de la ligne de flottaison. Je l'ai regardé avec tendresse, essayant de lui faire comprendre que j'étais avec lui. Mais rien n'y a fait. Sa tristesse troublait le reflet. L'air de rien je l'ai laissé face à son destin qui devait se dessiner sur le mur d'en face. Je me suis glissé sous la douche. Et là, l'accablement m'a rejoint dans la vapeur de l'eau qui ruisselait. Je me suis concentré sur le savonnage. J'en ai mis partout, même là où je ne vais jamais. J'ai regardé les bulles disparaître dans le siphon. Je suis sorti. J'ai attrapé une serviette et je me suis à nouveau planté devant le miroir. Il était toujours là, des gouttes en équilibre sur le crâne. J'ai vainement attendu qu'il me soutienne, ne serait-ce qu'un peu, ce qui aurait été un juste retour. Mais rien. Pas la moindre compassion. Aucune solidarité. Pourtant, je ne lui en veux pas. Je ne fais même que penser à lui depuis ce matin. Peut-être le retrouverai-je ce soir, une brosse à dents dans la bouche.    

Sans doute

Un jour sûrement. Un jour à n'en pas douter. Un jour sans presque. Un jour où la voix sera au-delà. Un jour j'entendrai ton chant. Des mots que je ne comprendrai pas se faufileront entre les harmonies. Ce jour où le sens n'existera plus. Ce jour sans lien, délivré des souvenirs. Ce jour suffira.

lundi 13 octobre 2014

Hasard

L'amour du pareil au même. Presque le même que celui rencontré dans les brumes. Sur les pas de cette blancheur confuse. La falaise se disloquait. Le fruit de sa défaite roulait sous mes pieds. Hors de la lumière du jour, le ressac s'accrochait au mouvement comme un rappel de l'usure. Le sens suivait le hasard du désir. Que sa silhouette prenne mon rêve avant que le temps ne se méprenne. Que pouvais-je craindre de ce monde qui se cachait dans l'absence? Comme un fossile dans ce brouillard venu du large, chaque goutte était comme un souvenir qui s'estompe dans l'impatience.

Sa voix

La retrouver dans ces quelques mots de douleur. Je repousse le matin. Encore un peu de temps. Encore un peu de temps pour me blottir. Pour que les caresses ne cessent. Pour que tout disparaisse. Jusqu'au jour où il ne restera rien. Demeurera cet instant. Cette solitude qui nous a ensevelis. 

samedi 11 octobre 2014

Celui d'après

Délaissant provisoirement mes souvenirs, j'entrai dans le hammam. Un homme, plutôt jeune, c'est à dire moins âgé que moi, se trouvait derrière un comptoir d'une couleur respectable. Je vis tout de suite dans son regard que quelque chose le chagrinait. Comme si son attitude avait été une injonction, je stoppai ma progression vers lui. Depuis tout petit j'ai une âme de coupable. Je ne sais pas d'où me vient cette facilité à me sentir en faute. Quoi qu'il en soit, sur le moment, sans qu'un seul mot ne soit échangé, j'étais certain d'avoir enfreint un point de règlement. Peut-être fallait-il que je me déchausse avant d'entrer ou que je baisse les yeux en entrant en ce lieu dont dieu ne pouvait être absent? En ces moment d'incertitude timorée je ne brillais pas par mon intelligence ou par toute autre manifestation d'une humanité de bon aloi.  

Je ne pouvais pas concevoir de faire demi-tour. Je m'avançai jusqu'à lui et lui fis part de mon intention de profiter de la chaleur ambiante. Avec une amabilité souriante, il me fit remarquer que l'entrée était réservée aux femmes. A la suite de cette révélation le silence s'installa. Je devinai dans son attitude combien il était désolé. Je ne savais pas trop quoi faire. Le sourire qu'il m'offrait m'empêchait d'évaluer sa détermination. Je n'avais pourtant pas l'intention de me conformer au règlement. En retour je lui souriais. J'avais conscience que ce ne serait pas suffisant. Pourtant, j'hésitais à lui parler, à argumenter. Il fallait que je l'entraîne à passer outre la règle sans qu'il se sente en danger, manipulé. Il fallait que j'utilise les circonstances et non pas remettre en cause le fait que les hommes ne pouvaient pénétrer en ce lieu. De toute façon, je ne sais pas convaincre. Dans mes relations avec les autres, je ne suis jamais crédible. Je donne cette impression de distance, de n'aspirer qu'à la solitude, cette solitude qui ne donne pas envie.
Sans trop savoir où j'allais, je lui fis remarquer qu'il ne restait que quelques minutes avant la fermeture et qu'en conséquence il était probable qu'il n'y ait plus personne. Peut-être avait-il la possibilité de le savoir. Il ne répondit pas à ma question. Je lui précisais alors, quel argument, que je pouvais m'aventurer à l'intérieur et que si je rencontrais quelqu'un, qui s'avérerait être une quelqu'une, il pouvait compter sur moi pour que je fasse demi-tour. Je n'avais quand même pas la tête d'un pervers. Il pouvait me faire confiance. De plus, dans ce cas, je ne demanderais pas à me faire rembourser. J'attendis sa réponse. Il resta silencieux. Illusion ou pas, la nature de son silence avait changé. C'était à présent un silence encourageant enrobé d'un sourire compréhensif. Il posa une serviette blanche sur le comptoir qui nous séparait. Je pris la direction des vestiaires.  

mercredi 8 octobre 2014

Profondeur

Le temps a passé. Je l’ai laissé s’éloigner. J’espérais qu’il t’emporterait, qu’il nous emporterait avec l’amour, cet amour que tu avais fait naître en moi. J’étais près de toi. Si près que j’entendais l’éveil des feuilles. Le mouvement des jours se perdait entre tes doigts. De tes lèvres s’échappaient des notes claires et sombres. Les instants étaient des éternités brisées. Les mots retraçaient des vérités qui t’apaisaient. Peut-être déjà une autre vie.  

Celui d'après

Je regardai l'heure. J'avais raté mon train. Je prendrai celui d'après. Après quelques pas, j'entrai dans le hammam avec des souvenirs. Les souvenirs d'une ville de l'Est. Cet ex Est qui fut des plus gris et austère, soumis pendant de nombreuses années à un hiver idéologique. Pendant plusieurs décennies, la seule preuve de l'existence du temps étaient les fissures grandissantes qui ornaient les murs des villas couleur sable qui s'imposaient le long d'avenues bordées d'arbres qui semblaient hésiter à se déployer au-delà des trottoirs sur lesquels marchaient ces femmes et ces hommes dont les souffrances ne sont peut-être même plus des souvenirs alors que je me dirigeais vers les bains alimentés par les sources chaudes qui se faufilent sous la ville. Durant toute un après-midi, je passais d'un bain à l'autre, me laissant aller à l'eau qui passait du tiède au chaud. Le plaisir d'avoir un corps.