mardi 27 mai 2014

Clin d'oeil

Il voulait être hors de tout. En refermant la porte, il avait laissé ce qu'il n'était pas un peu partout dans l'appartement. Tout en descendant l'escalier, il fit le tour de son esprit à la recherche d'éventuels restes de désirs dont il n'avait plus que faire.Il traversa les rues à la découverte des trottoirs, des bruits de pas, des reflets de lumière dans les vitres, des flaques en sursis. Les voix lui parvenaient. Il regardait. Il regardait tout. Rien ne semblait lui échapper comme si à chaque pas il avait absorbé une part de cette ville. Même les ombres ne semblaient plus rien dissimuler. La nuit n'était pas un prolongement, ni une attente. Levant les yeux, il se souvint des mots de Keats parcourant les rue de Rome "La nuit est un cyclope qui lentement cligne de l’œil". Il avait depuis peu découvert la poésie, ces mots qui lui caressaient l'âme, qui le ramenaient à la vie comme en cet instant. Il lui arrivait à nouveau de vouloir être heureux. Cette envie était parfois fugace ou pouvait se répandre en lui tout au long d'une journée. Il redécouvrait la légèreté, ce besoin de courir vers la vie, d'y plonger, de la sentir glisser sur sa peau.   

vendredi 23 mai 2014

Charmant

Que n'ai-je retenu les flocons
Frissons d'étoiles
Fragments de silence
D'une passion endormie

Jour de mai

Les pétales sont à terre
Après avoir traversé l'air
Ces matins où il veut être
Être heureux et disparaître
Dans les nervures végétales
Légèreté d'une destinée fractale
Il se confond dans la couleur
L'herbe l'absorbe en douceur
L'odeur des jours subsiste
Reste d'une ancienne piste
De poussière et de creux
Qu'il ne peut quitter des yeux 

mercredi 21 mai 2014

Demain

Avec la chaleur tout est fini
Comme si c'était toujours la veille
Pour qu'enfin tout redevienne pareil
Et que nous partions loin d'ici

Un jour prochain nous reviendrons
Nous aurons alors tout oublié
Comme un reste de vérité
L'ombre de l'absence nous accueillera

Après avoir abandonné les divinités
Nous oserons marcher vers la clarté
Ici notre vie nous appartiendra
Nous qui avions cru qu'elle était là-bas

lundi 19 mai 2014

Snif ou lalalère quater

J'aime bien commencer par la fin
Quand il ne reste plus que ton parfum
Quand, dans un dernier souffle, tu pars
Me laissant dans son monde à part

Parfois la fatigue me rattrape
Dans les rides moites des draps tièdes 
A l'ombre des plis les cris s'échappent
Des feintes étreintes qui se succèdent

A la recherche de tes empreintes
Que l'avidité abandonne
Sur les chemins que tu empruntes
Laissant suinter l'amour que tu donnes

dimanche 18 mai 2014

Lalalère ter


Dans l'air je t'ai vu tournoyer
Légère tu étais comme l'amour
Une fleur dans l'herbe frôlée par le vent
Parfum sucré jusqu'à mon cœur

Ton doux sourire sur mes lèvres
Comme une caresse s'est posé
J'étais une barque à la dérive
Je n'étais plus rien qu'une pauvre esquive

Je naviguais le vague à l'âme
Si loin de moi jusqu'à ton phare
Pour dans l'écume entrelacs rares
Enfin j'émergeais de ta source salée


  

Tentation

Etait-il dans le reflet de cette flaque stagnante qui disparaîtrait dans la chaleur de l'été, laissant apparaître la vase qui bientôt se craquellerait. Une décomposition qui n'en finissait pas. A croire que le temps s'était absenté. Des feuilles sans énergie se figeaient dans la putréfaction. Elles n'étaient plus que des restes d'un cycle de vent et de lumière. L'eau qui autrefois les avait irriguées s'appliquait à les transformer, à les dévorer avec cette lenteur qui ne laisse aucun espoir. Elles feraient partie de cette vase, chrysalide d'une autre vie,  dans laquelle se tortillaient les vers, patientaient les larves. Il avait envie d'y plonger la main, de la sentir immiscer entre ses doigts, tiède, visqueuse. Combien de temps faudrait-il pour sa main disparaisse elle aussi?  Il serrerait le poing et devinerait cette matière s'échapper, glisser entre chacune de ses phalanges. Cette inconsistance le fascinait. Une pulsation qui l'aspirerait, l'accueillerait en son sein, se refermerait sur sa présence. Se nourrirait de sa vie passée. Elle offrirait sa surface au jour.

vendredi 16 mai 2014

Bon alors?

De quelle vie avais-je envie?
Une vie qui laisse en vie?
Était-ce cette vie?
Une autre vie?
La vie qui s'écoule à l'infini?
Une vie qui emporte notre vie?
Une vie qui s'emporte et finit?
Une vie qui donne envie?
Avais-je seulement envie?


Lalalère

Dans tes cheveux reflet d'amour
Dans tes grands yeux c'est pour toujours
Dans tes regards c'est comme le jour
Dans ton amour je suis troubadour

Sur ton chemin c'est sans détour
Sur ton visage pas de contrejour
Sur ton rouge-cœur tonne le tambour 
Et sur tes lèvres comme du velours

Sur ta rivière naviguer sur l'onde
Je te suivrai jusqu'à ton monde
Le long des routes âme vagabonde
Dans ton sillage à chaque seconde

Dans l'air ton parfum effluve sublime
Me précipite jusqu'à l'intime
Tous ces atours te rendent divine
Et tout autour caresses clandestines


Lalalère bis

C'est notre histoire c'était hier
Et dans ma bouche un goût de terre
C'est notre histoire c'était nous deux
Et maintenant je suis malheureux

Nos mains enlacées sans nous lasser
Nous caressions nos corps à corps
L'ombre humide criait encore
Pour nous perdre et trépasser 

Nous étions l'accord sans fausse note
Dans nos veines comme un antidote
Flot de caresses pour notre amour
Nous conduisait vers l'autre jour

Et puis ce jour s'est fracassé
Dans cet air froid d'un matin pressé
Comme abandonné dans un lointain
Loin d'un baiser près de la fin

mercredi 14 mai 2014

Proche

Les pensées délavées se perdent dans le bleu du ciel
Il se fond avec lenteur dans cet infini qui se rapproche
Jusqu’à sentir cette présence comme un parfum de miel
Les souvenirs disparaissent dans le mouvement d’un reproche
Le long de cette route, s'estompent dans la brume d'une hésitation
Les parfums du vent d'avant que respiraient ma peau
Presque rien, quelques seconde pour une passion 
Pour voir la vie à nouveau s'écouler au fil de l'eau 

ça peut toujours servir



Des spermatozoïdes vieux, pour le moins, de 17 millions d'années ont été découverts en Australie. Je me suis dit que cela allait certainement m'inspirer quelque chose. Un trait d'humour, une formule, un réflexion, un mot d'esprit. Il est à remarquer que cette énumération prouve que je ne doute pas de mes capacités. Pourtant, j'ai cherché mais en vain. Y avait-il quelque chose à trouver? Je me suis donc contenté de leur portrait.

Les spermatozoïdes fossilisés les plus anciens jamais découverts sont plus grands que les crustacés qui les produisaient.

jeudi 8 mai 2014

Là-haut

La rivière est à sec. Ce n'est plus qu'un lit. Les pierres arrondies témoignent de l'ancien flot. Dans le vent, des grains de sable, guidés par l'indécision, virevoltent et rebondissent. La chaleur coule le long des creux. Sur la berge, les arbres semblent attendre le retour de l'eau. Peut-être hésitent-ils. Ils ont encore le souvenir de la fraîcheur, des nuits où l'eau était une présence bruissante qui attirait les animaux. Se dessine sur l'écorce le frôlement de ces anciennes présences. Comme si elles voulaient échapper à la sécheresse de la terre, les racines se sont un temps aventurées à la lumière avant de disparaître à nouveau. Les branches ploient sous le poids du jour. Les feuilles se frottent à la chaleur. La clarté semble repousser l'ombre. Le temps a renoncé à sa mémoire. Le passé s'est éparpillé, usé par le souffle du renoncement. Le regard se perd dans le ciel sans couleur dans lequel se dilue le soleil. L'horizon paraît s'être dissous. Comme des souvenirs abandonnés, des insectes perpétuent le mouvement en se glissant entre les cailloux. Les battements d'une vie qui doute qu'un jour la source se laissera submerger par l'eau.

Patience divine

Illustration


 J'ai découvert, dans un article à caractère scientifique, une vidéo de deux minutes qui résume 13,8 milliards d'années d'évolution cosmique. Du big bang jusqu'à aujourd'hui. De la première seconde à cette seconde. Et comme à chaque fois qu'il est question de cette première seconde de l'univers, je ne peux pas m'empêcher de me poser cette question : que s'est-il passé avant cette première seconde? A chaque fois je bascule dans l'insondable, dans l'inconcevable, dans le vertige de l'infini et rapidement je renonce à toute forme d'investigation ayant bien conscience qu'il n'y a pas de temps, ni d'avant ni d'après. C'est pourtant rassurant un début et une fin. Ensuite survient souvent la question de dieu ou plus précisément de son emploi du temps. Si je renonce à m'interroger à propos de ce qu'il a fait avant la première seconde, je me demande ce qu'il a fait pendant les dix milliards d'années qui ont suivi la première seconde, délai approximatif qui a été nécessaire pour la première manifestation de vie sur la Terre. Il a probablement réfléchi en attendant que l'univers refroidisse comme un enfant qui souffle sur une purée trop chaude.

mercredi 7 mai 2014

Où ça?

L'autre jour j'écoutais la radio. Contrairement à ce que pourrait laisser croire cette première phrase, ce n'est pas une situation exceptionnelle. Je l'écoute souvent. J'écoutais donc. Le propos m'intéressait. S'exprimait, me semble-t-il, un acteur. Je dois avouer que je m'intéresse davantage aux mots qu'à celui qui les prononce, ce qui, je le concède, n'est pas bien. Cet acteur, parlant des acteurs et de tout un chacun, expliquait que, quelle que soit la situation, nous étions rarement tout à fait là, jamais totalement présent. Je ne vais pas entrer dans le détail, que je ne maîtrise pas, mais si nous ne sommes jamais vraiment présent là où nous sommes c'est que, contrairement à un animal, nous avons conscience de ce que nous sommes. Nous avons cette capacité à prendre du recul. Nous sommes capables de nous observer, de faire preuve de dérision, de ne pas nous prendre au sérieux. En revanche, il ne faut pas compter sur le lion pour faire de l'humour.
J'en ai conclu que, d'une certaine façon, nous sommes éparpillés. A tout instant, notre corps est un leurre. Un avatar pour plonger dans la troisième dissension. L'autre, pour autant qu'il s'interroge, ne sait jamais si nous sommes là. Tout en étant là, nous sommes pour partie ailleurs. Pour autant, savons nous où nous sommes? Savons nous où est partie cette autre partie de nous-même? Dès l'instant où nous sommes avec l'autre, nous sommes absents. Une amie proche me faisait part il y a peu du fait que lorsqu'elle était présente à une réunion, au bout de cinq minutes son esprit s'évadait et qu'ainsi elle n'était plus qu'illusion aux yeux des autres qui auraient pourtant juré qu'elle était là.
Je ne sais plus trop où j'en suis. Pouvons nous souffrir ici tout en jouissant là-bas, dans un même élan? Il me semble avoir déjà ressenti un doux plaisir à ne pas être là.

mardi 6 mai 2014

Faiblesse

Le jour se referme comme une tombe. Un trou sans âme. Juste la place pour que la mort puisse s'y blottir. Les mots ont disparu. Il ne reste rien. Une pointe qui s'enfonce profondément. Sans force, la vie s'est retirée au loin. Le désespoir n'est plus un refuge. Retenir ce qui a disparu. Les souvenirs sont usés comme ce bout de tissu qui livre sa trame. Il est froissé, fripé. S'y cache la douceur, la ferveur de cette main qui l’étreignait. La peur que cela soit vrai. Aller chercher toujours plus profond avec cette croyance qu'un jour je m'éveillerai.   

lundi 5 mai 2014

Vers

Les pensées flottent
Au bord du vide marin
Les solitudes s'observent
Se frôlent, s'espèrent
Le long du chemin
Les oublis volent dans le vent
Comme des cerfs-volants
Qui s'échappent de la main
Le besoin de se réfugier
De disparaître dans le passé
La chaleur des sentiments
Ne peut chasser la peur
Qui enserre le cœur
L'horizon semblait si proche

dimanche 4 mai 2014

A la mer

Le rêve de tes lèvres
Sur le rire de ton livre
Ton sourire pour vivre
Tes pas pour partir
Pourtant ce premier instant
Déjà finissant, hésitant
Comme des rochers
Dans le sable figés
Recouverts par les jours
Éclats de poussière
Venus d'hier
Étouffent notre amour

Pas fini

 Même en catimini
S'embarquer pour l'infini
Pour que rien ne soit fini
Rencontrer l’inouï
Oublier tous ces cris
S'éloigner du paradis
Espérant que tu me souris
Tout près, là-bas, ici
Et qu'à nouveau tu joues dorémi 

Immobile



Jusqu'au dernier instant nous partageons notre vie. Jusqu'au dernier instant nous sommes éternels. Même si la vie nous a déjà fait vivre le manque, le chagrin, la douleur, l'absurdité, nous nous refusons à croire que cela se reproduira. Comment pourrions-nous imaginer que notre amour, que notre tendresse, que nos regards, que nos sourires, que nos espoirs ne soient pas assez forts pour retenir ceux que nous aimons, ceux qui sont notre raison de vivre. La mort de ceux que nous aimons plus que tout arrache une part de nous-même qui disparaît avec ces yeux qui se ferment. La vie se retire par vague, pendant que la mort écume, dans le blanc des crêtes, la fureur des cris de ceux qui s'éloignent, se perdent au fond de nos regards, s'accrochent à notre mémoire comme un sourire qui repousse notre désespoir. Allons-nous vivre comme hier? Je me souviens d'hier, ce temps d'avant, d'avant que le temps ne soit un poids. Les matins où l'air léger faisait onduler le cerisier.
Je le sens sur ma peau comme un appel. Le vent est toujours là qui m'offre son parfum. Il me supplie. Le jour d'après n'est jamais venu.