vendredi 29 février 2008

Colère (2)

Fin du suspens. A en croire les principaux candidats, nous allions entrer dans une nouvelle ère politique. Fini les magouilles, les petits arrangements entre amis, vive la transparence, la modernité. Un nouveau souffle allait chasser l'air putride de l'affairisme chiraquien. Ils allaient dire la vérité, mettre les choses sur la table, être honnêtes, intègres, uniquement préoccupés de l'intérêt général. La promesse était qu'ils allaient rendre ses lettres de noblesse à la politique, qu'ils allaient faire de la politique autrement, plus proche des citoyens.

Cela commençait bien puisque notre président avait dit que si il était élu il ferait une retraite dans un endroit isolé afin de prendre pleinement conscience de la charge qui serait la sienne, ajoutant qu'être président nécessitait ascèse, sens du sacrifice.

Quand il est allé au Fouquet's, je me suis dit qu'il avait simplement souhaité goûter une dernière fois aux frivoles et dispendieux plaisirs terrestres. Quand il a passé quelques jours sur l'embarcation de son ami Vincent, je me suis dit qu'il était comme les personnes qui essayent d'arrêter de fumer. Ils commencent par fumer la dernière, puis la dernière des dernières. Sur les vagues, il s'offrait le dernier des derniers plaisirs. Et puis...il a fini par nous dire que pour rendre les français heureux, il devait d'abord être heureux. Il ne nous reste plus qu'à attendre.

J'ai un peu dévié de mon idée initiale. J'y reviens. C'est en lisant Libération mercredi que la promesse de la politique autrement m'est revenue à l'esprit. J'y ai lu deux citations de porte-parole de l'UMP, mais le parti n'a en soi aucune importance. Première citation de Yves Jégo " Contrairement au parti socialiste, nous ne voulons pas que des prédateurs sexuels soient dans les rues et menacent nos enfants". La deuxième de Nadine Morano "Je laisse le soin aux français de juger le parti socialiste, qui se met clairement du côté des assassins et oublie toutes les victimes". Vous allez me dire pourquoi croire cette promesse plus qu'une autre? Je ne sais pas. J'avais envie, besoin d'y croire, c'était le printemps.

jeudi 28 février 2008

Colère (1)

Il y a quelques mois de cela, juste quelques mois, lors de la campagne des présidentielles, une promesse avait retenu mon attention, une promesse qui ne creuserait pas le déficit des comptes publics, une promesse qui allait nous réconcilier avec les hommes politiques, une promesse qui allait nous redonner confiance, une promesse qui allait nous redonner la fierté d'être un citoyen, une promesse qui nous redonnerait le goût de la chose publique, une promesse qui ferait renaître en nous l'envie, l'envie de nous impliquer dans la vie de nos cités, l'envie d'assumer nos responsabilités, l'envie de nous engager.

Cela devait être une sacrée promesse, vous dites vous. Vous cherchez, mais quelle était-elle donc cette promesse si prometteuse? Serait-il possible que vous l'ayez oubliée ce qui, d'un sens, ne serait pas surprenant ni condamnable. Cette promesse vous a peut-être paru si séduisante que vous vous êtes dépêchés de l'oublier de peur de connaître les affres de la déception.

Je vais vous faire patienter 24 heures. Si d'ici là vous pensez avoir retrouvé la mémoire, faites m'en part.

lundi 25 février 2008

Dans un lit

Ainsi, pendant longtemps, trop longtemps à mon goût, si je sentais une main se glisser entre mes draps, ce ne pouvait qu'être la mienne. Je fus, du primaire à la terminale, l'heureux propriétaire de deux lits une place, qui ne faisaient pas un lit deux places, un à la maison et l'autre en pension. Dans les dortoirs se succédaient les enfilades de matelas mousse reposant sur des lattes métalliques qui, telles les oies d'un capitole de la chasteté, couinaient dès l'instant où elles décelaient un mouvement vertical, continu et d'une certaine intensité. A la réflexion, cette contrainte n'était pas sans vertu. Elle obligeait le candidat au plaisir à faire preuve de retenue, à découpler vitesse et satisfaction, ce qui lui permettait de découvrir la volupté, récompense de la patience.

A cette époque de solitude, d'incertitude et de peur, mon lit était aussi un refuge, un étroit territoire bordé de précipices et que je voulais inviolable. Une fois les lumières éteintes et les surveillants retournés dans leur tanière, je disparaissais sous les couvertures et m'imaginais à l'abri d'un monde hostile et froid. Je devais refaire surface régulièrement pour assurer le renouvellement de l'air ambiant. Avec l'expérience, j'avais aménagé un système d'aération. Une fois certain de ne pas être surpris par la patrouille, je plongeais, tête la première, au fond du lit et y aménageais une ouverture qui permettait la circulation de l'air. Sans le savoir, j'atteignais là le summum de mes compétences en matière de bricolage.

jeudi 21 février 2008

Dans un lit

J'ai essayé de me remémorer tous les lits dans lesquels j'ai couché, dormi. Je me souviens de lits dans lesquels je n'ai mis les pieds qu'une seule fois. Curieusement j'ai aussi le souvenir de lits dans lesquels je n'ai pas couché. Il semblerait que je fasse la distinction entre coucher et dormir. "Je te rejoindrai dans ta couche". Cette phrase, lue ou entendue je ne sais plus où, évoque un érotisme terrien dans lequel on se glisse, qui enveloppe nos corps qui se laissent guider par le désir.

Pour les cinq premières années de ma vie, rien. Non que l'on me fit dormir sur le sol, mais je ne dispose d'aucune photo cérébrale d'un lit de cette époque. Tout en écrivant je me dis que le chronologique ne s'impose pas. J'ai connu des lits de bonne et de mauvaise fortune. Quand j'étais petit, je préférais le lit de mes parents au mien. Il était plus grand, il possédait deux oreillers. Il était propice à l'imagination, tendance Jules Verne.

J'ai longtemps fréquenté le lit une place, ce qui se comprend puisque je n'avais que moi à mettre dedans. Si les dimensions du lit une place favorisent la création de fantasmes et de tout ce qui s'y rapporte, il est aussi un rappel permanent de votre solitude. Le lit une place est démoralisant, ne vous laisse aucun espoir puisque lui n'est pas évolutif. Le lit une place qui évolue avec votre libido reste à inventer.

mercredi 20 février 2008

On y croit

A tort ou à raison, l'avenir me le dira, il est des aventures qu'il faut préparer avant de les vivre. Parfois, cette préparation peut se résumer à peu de chose, à pas grand chose voire à rien. J'ai décidé de lire "Les Bienveillantes". Que l'on ne s'y trompe pas, cette décision ne réclame aucune volonté particulière, je n'ai pas pesé le pour et le contre mais j'ai le sentiment que je ne le lirai pas comme tant d'autres livres.
Ce livre, pour l'instant, repose sur la commode de la chambre. Chaque jour je le vois et le regarde avec bienveillance. Les livres sont pour moi source de plaisir et finissent, un jour ou l'autre, par se retrouver dans mon lit car, pour l'essentiel, je lis au lit. A ce titre, "les bienveillantes" est un cas d'école.

Je vais lire la version NRF, par définition prestigieuse mais encombrante et lourde, donc peu adaptée à la lecture horizontale. Pour tout vous dire, je commence toujours ma lecture en étant couché sur le côté droit puis, si je ne me suis pas endormi avant, j'effectue une rotation, ce qui n'est pas sale, vers la gauche. Ainsi, en début de livre, couché sur la droite, la partie lourde du livre repose sur le lit, assurant un bon confort de lecture. Par contre, quand je passe à gauche, c'est mortel (je sais, c'est idiot mais je n'ai pas résisté). La partie lourde se trouve en l'air et la main droite est mobilisée pour éviter que le livre ne se referme. Pour un livre de poche, je place le pouce entre les deux pages. Là, si je procède de la même manière le livre se referme. Si je mobilise la main gauche pour palier une répartition déséquilibrée de la charge, mon épaule se trouve légèrement décalée ce qui rajoute à l'inconfort. La position couchée à gauche n'est pas sans danger car je finis par m'endormir et ma main droite en profite pour se relâcher. Le livre tombe, se referme sur mon nez et finit par échouer au bas du lit. Je suis réveillé et j'ai perdu la page. Je vais essayer d'illustrer mes propos de quelques photos.

Mon projet concernant "Les bienveillantes" est d'écrire des chroniques pour vous tenir informé de mes impressions tout au long de la lecture. Reste à savoir si ce projet deviendra réalité. J'ai aussi envie de vous parler de mon lit.

mardi 19 février 2008

Après...le déluge

Souvent, nos hommes politiques, du moins ceux dont le micro semble être un prolongement naturel de la bouche, ne se lassent pas de nous dire qu'ils sont responsables devant les électeurs, devant le peuple français. Il est probable que dans leur esprit, cette affirmation soit un gage de sérieux, voire de courage.

Depuis quelques temps, je m'interroge sur le sens, la valeur de cette responsabilité brandie comme un étendard. Il y a quelques jours j'ai lu deux informations qui ont relancé ma réflexion sur le sujet. Les deux gouvernements du précédent quinquennat avait pris, devant le peuple français, d'une part l'engagement de rénover un certain nombre de chambres d'étudiants et d'autre part, priorité nationale, de développer une politique en faveur des personnes handicapées. Les bilans concernant ces deux engagements ont montré que la moitié des chambres qui devaient être rénovées l'ont été et que compte tenu de l'absence de plusieurs décrets d'application, la loi concernant les personnes handicapées ne peut que partiellement être mise en application, sachant qu'au cours des neuf derniers mois, la situation est restée en l'état. Nous pouvons supposer qu'il y a d'autres exemples puisque un certain nombre de lois ne donne jamais lieu à décret.

Quelle est la responsabilité des femmes et hommes politiques qui se sont engagés? Certains font partie du gouvernement actuel, d'autres sont des élus de la République. Nous savions qu'ils n'étaient pas coupables, pouvons-nous dire qu'il ne sont pas responsables ou que c'est nous, citoyens, qui sommes irresponsables?

dimanche 17 février 2008

Une main sur l'épaule



"Un matin de semaine. Presque un matin comme les autres. Il n'y pensera pas, il n'en parlera pas. Il regarde par la fenêtre de la cuisine. Les étoiles sont encore là. Elles disparaîtront avec le jour. Il aimerait tant que ce soit un matin comme les autres. Il n'a pas faim. La peur lui coupe l'appétit. Il a le sentiment qu'agir comme d'habitude lui permettra de conjurer le sort. Son esprit lutte avec les pensées, fait le tri et tente de détruire les mauvaises avant qu'elles ne lui parviennent."



Il sort. Le ciel s'éclaircit. Il peut voir l'air qui s'échappe de ses poumons. Cela fait plusieurs jours qu'il attend, plusieurs jours qu'il se fait discret, qu'il fait tout pour passer inaperçu. Il ne peut pas s'empêcher de se demander si il n'est pas devenu lâche. Chaque jour depuis trente cinq ans, ses jambes empruntent le même parcours, enfin presque. L'ancienne fabrique où travaillait son père a été rasée pour faire place à un lotissement qu'il traverse pour se rendre au travail.

Il passe la grille de l'usine. Il pourrait aller jusqu'à son atelier les yeux fermés.
Quelques poignées de mains. Tout compte fait, il aimerait en parler pour se rassurer, pour sentir un peu de chaleur mais personne ne s'attarde. Il rejoint son poste.

La matinée se termine. Il ne sait pas s' il doit se sentir soulagé ou si ces quelques heures passées le rapprochent de l'inévitable. A chaque fois qu'il entend des bruits de pas dans l'allée, il n'ose plus bouger. Il ne parvient pas à imaginer ce que sera sa réaction. Il sait que si son tour arrive, on ne lui permettra pas de revenir une dernière fois pour dire au revoir à ses collègues. Il passera directement du bureau au trottoir.

Il flotte dans le présent. C'est comme si son passé avait disparu, comme si sa mémoire était devenue une gomme, comme si le film de sa vie avait été exposé à une violente lumière. Sa vie est devenue comme si...Un dernier coup de gomme et il disparaîtra avec sa vie.

C'est à peine si il a entendu les pas mais il a senti la main se poser sur son épaule.


Lors de mes trajets pédestres et quotidiens, n'ayant rien de précis à faire, je finis souvent par me demander ce qui nous unit, quel est notre projet commun, qu'est-ce qui fait que nous aurions envie de vivre ensemble. J'arrive toujours à destination avant d'avoir trouvé la réponse. L'actualité fait régulièrement resurgir ce questionnement. La dernière fois c'est en écoutant un reportage qui expliquait que les dirigeants d'une entreprise avaient élaboré un plan social comportant plusieurs dizaines de licenciements, le nom des salariés concernés n'étant connu que des décideurs. Ainsi, chaque jour, on est venu chercher individuellement, à leur poste de travail, chaque personne pour la conduire dans le bureau du drh qui lui signifiait son licenciement. Ensuite, il était dirigé vers son vestiaire et reconduit aux portes de l'entreprise.

Interrogé, Xavier Bertrand déplorait ces méthodes, ce non respect de la dignité humaine. Pour le coup, je ne lui en veux pas, mais j'ai l'impression qu'il réagit comme vous et moi, qu'il n'a pas plus de pouvoir que nous, qu'il ne peut protéger un homme contre la violence d'un monde qu'il a aidé à construire mais qui n'est plus le sien. Serions-nous incapables de défendre la dignité de nos concitoyens? Sommes-nous condamnés à la résignation, à l'impuissance?

vendredi 8 février 2008

Labour de moins en moins



L'autre jour, lisant le journal, je tombe sur le titre suivant "LA PRATIQUE DU NON-LABOUR S'ÉTEND DANS LES CAMPAGNES FRANÇAISES". Je ne sais pas vous mais pour moi, labour et paysan sont intimement liés. Le paysan laboure et sème. Le geste auguste. Bien sûr, aujourd'hui, on ne dit plus paysan mais agriculteur, ni ferme mais exploitation, on ne cultive plus, on optimise des surfaces arables.
Il y a bien longtemps, le paysan éprouvait des difficultés à labourer profondément, ne faisant parfois qu'égratigner la surface de sa terre. Et puis, avec la mécanisation, comme un signe de puissance, comme pour laisser une empreinte, l'ouvrant profondément, l'agriculteur préparait sa terre. Bientôt, foin de préliminaires, le semeur, enterrant la tradition, lancera la graine, OGM capable toute seule comme une grande de faire son trou.
Vous verrez que disparaîtront aussi les suceuses d'occasion et, ce jour là, il sera trop tard!

mardi 5 février 2008

Des profondeurs



Je me souviens du bonheur passé et parfois je pleure
Pourquoi dans ce matin insouciant es-tu devenue lueur
Pourquoi de tes bras dois-je chercher en vain la chaleur
Il est des matins où me lever me fait peur
Des matins où je traverse une ombre de douleur
Je devine ton visage, ton sourire m'effleure
Et sans force je m'abandonne à ta douceur
Je m'approche jusqu'à te poser sur mon cœur
De l'illusion je ne refuse pas la douleur
Car je sais que je te retrouverai quand il sera l'heure