dimanche 30 avril 2017

La vie de nos choses

Depuis quelques jours déjà, je passais devant le panier à linge. Du haut de l'escalier, je le voyais débordant de linge en tous genres. Descendant les marches, je regardais ailleurs. En mon for intérieur, passant à ses côtés, j'avais bien conscience que cette situation ne pouvait perdurer au risque de froisser la fierté de ces vêtements ainsi entassés. Et c'est ce matin que j'ai pris conscience du caractère intolérable de cette situation. Comment pouvais-je, faisant fi des sensibilités, des cultures et des origines, ainsi mélanger les chemises, les pantalons, les chaussettes trouées, les petites culottes et autres caleçons? Ayant subitement la fibre du rangement, il me fallait mettre de l'ordre dans cet intolérable cosmopolitisme vestimentaire. A chaque corbeille son type de vêtement. Pour la couleur, je n'ai pas encore décidé.  

jeudi 27 avril 2017

Lumière

Ce matin, après avoir hésité, j'ai fini par ouvrir les yeux. Par la porte qui n'était pas fermée, j'ai vu de la lumière. Alors, je suis sorti. De la chambre. Je me suis retrouvé dans le couloir. Un long couloir qui menait ailleurs. J'ai cherché à savoir d'où venait cette lumière. J'ai regardé par la fenêtre. Dans un frôlement de givre une lueur encore lointaine atteignait les toits. Sans plus chercher, j'ai attendu qu'elle s'approche. Plus près.

mardi 25 avril 2017

Un instant seulement

Du vert et du bleu. Le bleu prolongeait son immobilité tout au long du jour. Son intensité variait. Dans le froid du matin, sa pâleur le rapprochait de la transparence. Comme un écho aux flaques de brume qu'écorchaient les brins d'herbe. La rosée renvoyait les impressions de lumière. Ses gouttes répandues semblaient comme les derniers éclats de la nuit. Loin de tout, le temps hésitait encore. Son indécision se déposait sur la cimes des arbres. De branche en branche, elle finissait par toucher le sol pour se répandre jusqu'aux imprécisions du matin. A l'abri du feuillage, les chants des oiseaux traversaient le repos de l'air. Le vert parsemait l'espace de son immobilité. Les derniers instants d'ombre allaient s'évaporer. La chaleur rasante se frayait un passage vers ma peau. Je la laissais se répandre. D'une caresse, elle éloigna le souvenir d'un frisson. Le soleil devenait le seul élément du temps. Avant que je ne ferme les yeux, infime, le ciel s'assombrit par dessus la cime. L'abandon se mêlait aux bruissements. Les sensations prenaient possession. Le vent livrait passage à ton visage. Je sentais ton regard. Je devinais ton sourire. Je m'endormis dans l'oubli.

lundi 24 avril 2017

Du bout des doigts

Dans la profondeur légère de ton refuge j'oublie les refus et les déluges. Entre les jours fendus, j'entre dans ton antre. Je cueille les mots du recueil parmi le silence de l'absence. Je quitte les abords des contreforts abrupts. L'embrasement de tes lèvres érige les secrets et les regrets. Les larmes délavent  notre histoire. Jusqu'au lendemain sans fin tu pars avec le jour. Je ne garde rien de toi pour te retrouver au hasard d'un désir.  

vendredi 21 avril 2017

La-haut.


Je rêvais. Je rêvais de toi. Comme si les nuits ne suffisaient pas. J'avais la tête ailleurs. Je ne sais où. J'attendais. Sans trop savoir quoi. Peut-être faisais-je semblant. Je regardais passer des inconnues et des inconnus, me disant que je ne les connaîtrais jamais. Jamais plus je ne les reverrais. Je n'en rêvais pas. J'ai entendu tes pas. Je devinais quand tu approchais même si parfois tu t'éloignais. J'ai levé les yeux. Je me suis dit qu'il aurait suffi d'un rien.

mercredi 12 avril 2017

Un hideux étroit

Je m'enfonçais dans la journée humide. Comme le dernier prince numide. Égaré dans les enchevêtrements apatrides. L'air rude se découpait en rides. Et répandait les borborygmes putrides. Dans le soulèvement des croûtes acides. De part et d'autre rampaient les fissures frigides. Laissant s'épandre les spasmes fluides. Parmi les remugles anguleux, j'aspirais l'amplitude des sculptures  avides. Comme rongé par les effluves d'un fleuve d'oxydes. Les éructations me décharnaient jusqu'au vide. Il me restait à choisir entre l'homicide et le suicide.

lundi 10 avril 2017

De mes amis


Entouré de quelques amis barbelés, un mirador de mes amis me faisait martialement remarquer que la fille de son père comptait bien rafler la mise.

samedi 8 avril 2017

Terre de paroles

Hier soir, je suis allé à l’hôpital. Il n'y avait pas d'urgence mais je n'étais pas loin et même près d'être en retard. Dans un amphi ampli d'une assistance composée de physiques un tantinet en déclin, à quelques exceptions près, nous avons écouté une lecture à deux voix. La lecture, par Anne-Sophie Pochet et Vincent Fouquet, des lettres que se sont écrites George Sand et Gustave Flaubert. Une correspondance. Autrement dit, une relation épistolaire. Nous pourrions même dire épistsolaire tellement... Voilà, c'était tellement. Ils écrivaient. Ils s'écrivaient. J'ai eu l'impression de tout deviner, comme si j'avais pu les observer. A l'écoute de George Sand qui raconte son quotidien, plaisirs et petits désagréments, et de Flaubert qui nous fait part, parfois non sans humour, de ce que l'on appelle les affres de l'écrivain, l'envie de prendre modestement une plume et une feuille de papier nous prend. Ecrire à quelqu'un et attendre le facteur. Attendre. Attendre et lire la réponse. Ne me reste plus qu'à trouver.
Metteur(e) en scène : Anne-Sophie Pauchet
Comédien(ne) : Vincent Fouquet
Musicien(ne) : Caroline Tref

Correspondance, Gustave Flaubert & George Sand

Au hasard.

Sans ami, hier soir je marchais au clair de la lune et au hasard des rues qui s'enchevêtraient dans un quartier de hauts et de bas. Quartier à l'architecture cosmopolite (oui, je sais) qui empêche de le ranger dans une quelconque catégorie, constitué de retraits paisibles. Je passais devant les portes fermées à l'exclusion quand j'ouïs une sourde mélodie. Mu par le murmure et la curiosité, je pousse la porte et l'audace jusqu'à entrer sans y être invité. Et que vois-je? Arthur, bassiste de son état. Alors, me dis-je, posons lui les deux questions. Ce qui fut fait.

vendredi 7 avril 2017

On se le demande

A autre chose. Passons-nous jamais à autre chose. Pourquoi faudrait-il passer à autre chose? Quelle est cette chose, cette autre chose ? chaque seconde de notre vie a en elle nos souvenirs, nos secrets, prête à nous les révéler encore et encore. Un mot, un visage, un geste, une impression, une brise, un reflet, un regard, un souvenir qui nous échappe, qui ne révèle que son ombre. La douleur des regrets nous frôle, les amours inachevées, les amours inavouées, les amours brûlantes qui nous consument encore. Le temps charrie nos vies jusqu’au dernier moment. Et puis tout disparaît, s’évapore laissant notre âme légère. Nous laissons les choses, les autres choses assombrir d’autres yeux, tourmenter d’autres cœurs. La dernière seconde nous libère. 

mercredi 5 avril 2017

Toi émois

Dessous. Dessus. Sous toi. Sur toi. Entre toi. Entre nous. Entre en moi. Les autres émois. Nos incertains surmois. Saoule-moi. Dessale-moi. Décale-moi. Désape-toi. Sans dessus. Avec dessous. Sans décence à fleur de l'eau. Les caresses carnassières le long de ma carcasse qu'à peine tu fracasses d'un sourire. Remous hirsute sans issue. Tu prends ma langue in situ. Tu me passes tout. Profonds leurres en glissades fibreuses. La tumeur enfle. Ose l'anfractuosité. Au plus profond épuisés .     

Vous pouvez répéter?

J'ai du mal à me souvenir du reste. Du reste je ne me souviens de rien. Le temps est passé avec tout le reste et les chiens jappaient pendant que je regardais ailleurs. D'ailleurs, je ne savais pas où j'allais. En déroute sur les chemins de la gloire. Gloire à deux, comme des âmes en plaine, démarraient saluant l'épique et collaient l'anagramme. Au pied de l'être, comme des glands, avec nos trompettes nous avons repoussé les frontières jusqu'aux murmures où j'ai ricoché. Nous sommes arrivés sur le trottoir, les barbares avaient déjà brûlé les écrits et les chuchotements. Restait plus qu'à essaimer l'amour.

A quoi bon


Mon fils à qui je demandais ce qu'il voulait être plus tard, alors qu'il sortait de sa classe de cp, me répondit je veux être heureux. Non, en fait, il me répondit, je veux être pompier. En réalité, je ne sais plus ce qu'il m'a répondu. Je crois même que je ne lui aie jamais posé la question.

lundi 3 avril 2017

Aux pieds

Où va se nicher la conscience politique? C'est ce que je me demandais l'autre jour tout en regardant mon tube de cirage. Pour tout vous dire, il y a quelque temps déjà, j'avais remarqué que mes chaussures, afin d'en prolonger la longévité et par souci d'esthétisme, avaient besoin d'un coup de cirage. C'est chaque soir en m'en délestant que je me faisais cette réflexion. Et chaque matin en les laçant, je me disais "Bordel, seul avec moi-même je suis assez souvent grossier, j'ai encore oublié. Faut absolument que je le fasse ce soir". Et ainsi passaient les jours où la procrastination le disputait à la mémoire défaillante. Et puis, ce matin, las de ce laisser aller, constatant un espace temporel entre l'ingurgitation de la dernière bouchée et le mettage (je sais) de la veste, je décide de passer au cirement (je sais) de mes chaussures. Je vais dans le débarras, prends le cirage adapté et me retrouve dans la cuisine. A chaque fois, je me pose la même question : dois-je cirer mes chaussures déjà aux pieds ou le faire avant qu'elles n'y soient? La plupart du temps je me pose la question alors qu'il est déjà trop tard. Donc, ce matin, déjà chaussé, je pose le pied droit sur le rebord de la chaise, je remonte légèrement le bas de mon pantalon et je me saisis du tube, qui en réalité n'en est pas un. Et, l'air de rien, je lis ce qui est écrit dessus. Et que lis-je? Bleu Marine. Allais-je faire briller mes chaussures avec Bleu Marine?

dimanche 2 avril 2017

Un soir au concert (1)

La vie. Ce qui est bien dans la vie, c'est que nous ne savons jamais. Même la seconde d'après nous ne pouvons rien en dire avant. Et pourtant, nous n'avons de cesse de nous projeter dans cette seconde dont nous ignorons tout (rassurez-vous, j'ai bientôt fini). Ainsi d'aucuns s'imaginaient honnête homme pour la seconde d'après se découvrir une morale incertaine. Moi-même qui vous écris, je pensais avoir vocation à être beau et intelligent et puis... Toujours est-il que de longue date j'avais prévu d'aller à l'Appart bar en ce 1er avril pour découvrir et écouter la suite de l'histoire. J'étais persuadé que j'allais le faire. Mais plutôt que d'y aller directement,( il faut toujours y aller directement mais ce qui n'est pas dans ma nature) et afin d'apporter réconfort et soutien à un ami qui, dans les vacillements d'un matin encore brumeux, avait oublié qu'un escalier comporte plusieurs marches, je fis un crochet par sa demeure. Et là, erreur fatale, j'ai partagé le réconfort en m'installant dans le canapé un verre de blanc à la main qui à de nombreuses reprises alla rejoindre mes lèvres. S'extraire d'un canapé n'est pas une mince affaire. J'en ai encore hier soir fait l'expérience. Mais enfin, mu par une volonté pondérale (je sais, ça ne veut rien dire), je me remis en route pour rejoindre l'Appar bar. Alors que je m'attendais à tourner, dès la première boucle, contre toute attente je trouve une place à proximité. D'une démarche imprégnée (je sais) j'arpente le trottoir sur lequel je croise deux musiciens de mes connaissances, pressés de se vider les ballastes d'avoir trop éclusé de ce liquide ambré qui à présent faisait pression sur leur intérieur. Après quelques serrages de mains plus ou moins réciproques, quelques bises qui procurent le plaisir de l'éphémère, je me campe face à la scène et j'attends. A suivre...

samedi 1 avril 2017

Pavé

Hier soir, le regard dans le vague, j'ai échoué au Havre. Errant sur le port, je chaloupais entre les containers, dans l'ombre des grues au pied desquelles déchargeaient les dockers. Au loin voguaient les couleurs aux reflets d'acier. Le vent transportait des odeurs narratives qui ondoyaient à l'approche des torchères. J'ai longé les quais ponctués de fixités métalliques que le temps rendait abordables. Dans les dernières lumières du jour, j'ai posé le pied sur la plage. Le lointain s'égarait dans la brume. C'est à ce moment là que j'ai entendu... Une mélodie qui venait du nord.

A tue-tête


Le désir parfois m'épuise. Quand ma peau est éprise. Le souffle se grise. Dans la lassitude des méprises. Avant que le corps ne se méprenne. Et ne s'enroule dans le bruit des chaînes. Comme une fissure qui m'entête.