samedi 31 octobre 2015

De quoi?

C'est encore confus dans mon esprit. J'ai consulté la presse, écouté la radio, mes collègues de boulot ainsi que moi-même. Il m'arrive en effet de m'écouter. Il m'est parfois nécessaire de formuler pour rassembler divers éléments se trouvant dans différents endroits de mon cerveau afin de structurer une pensée, ce qui me permets de connaître mon opinion à propos de tel ou tel sujet. Donc, après avoir lu et écouté, je me suis dit qu'il fallait arrêter. Il faut se rendre à l'évidence, nous sommes menacés, notre monde est menacé. Quelle est la nature de cette menace? De fait il n'existe pas qu'une seule menace mais des menaces. Des menaces qui nous menacent. Qui menacent notre quotidien, qui menacent notre civilisation, qui menacent notre culture, qui menacent notre couleur, qui menacent notre assiette, qui menacent notre langue, pour tout dire qui menacent notre existence. Quand chaque matin, ouvrant les yeux, je constate que je suis vivant, j'en suis presque étonné. Quand je me trouve installé à la table de la cuisine avec à ma gauche le beurre et la confiture, à ma droite mes tartines et au milieu mon café je sens m'envahir un soulagement et remercie Dieu d'être si prévenant. Quand, au petit matin, marchant sur le trottoir où légères virevoltent les feuilles d'un doux automne, je constate que seul le ciel est voilé, je sens se détendre mon corps et s'affermir ma démarche. Alors, confiant et sourire au lèvres, je poursuis mon chemin quand mon regard est attiré par l'étal de la charcuterie bien achalandé et baignant dans une séraphique lumière sous le regard bienveillant du charcutier qui me salue. De ses deux millénaires de gastronomie, la tête de cochon me contemple. Ainsi, toute cette journée sera jalonnée de tous ces signes, de tous ces riens qui font que notre pays est notre pays et le demeurera. Pourtant, car il y a un pourtant, diffuse je sens se répandre la menace. Derrière les sourires l'on devine l'incertitude baignant dans le doute. J'avoue, j'ai peur. Je vais prendre le temps de réfléchir et d'être à mon écoute pour savoir de quoi j'ai peur et je reviens vers vous pour vous dire quoi. 

lundi 26 octobre 2015

Autre chose (passer à)

Il y a des jours, je me demande. Je me demande ce que je fais là. Là précisément. Dans ce bureau mal chauffé. Je tapote sur des touches et je remplis des cases, plus précisément des cellules. Il en suffit d'une pour que je me sente à l'étroit. Je pourrais être ailleurs, même si je ne sais pas où. Il suffit d'en évoquer la possibilité. Je ne sais pas ce que je fais. Je l'ai déjà oublié. Le dérisoire envahit. Une journée dont il ne reste rien. Une journée faite de riens que je remplis de pas grand chose. Une journée aérophagique. Une journée redondante. Sait-elle seulement que je me suis levé pour elle, rien que pour elle? Une journée qui s'est moquée de moi, qui n'a pas respecté mon désir, mon désir de la remplir, d'en faire une journée pleine, une de ces journées dont on est fier. Comme le dit ma collègue, cette journée s'est foutue de ma gueule. Pour demain matin, faut voir.

dimanche 25 octobre 2015

Il était temps

Le jour se lève et le silence s'endort.

Ratiboisage (suite enfin)

Je me précipitais dans la salle de bain et osais me regarder dans le miroir. Ce que je voyais m'affligeait. J'avais l'impression d'être un autre. J'aurais aimé être un autre. J'avais beau me dire que c'était une question de temps, que d'ici quelques jours je n'y penserais plus, on m'avait pris quelque chose, qui n'avait rien à voir avec les cheveux. Je me confrontais à la perte.
Tout cela pour en venir au bucolique ratiboisage. Dans le jardin, s'était épanoui un noisetier qui faisait écran avec les voisins. D'aucuns le trouvaient envahissant, le noisetier. D'une certaine façon, on pouvait considérer qu'il outrepassait ses droits en passant par dessus le mur du voisin, ce mur qui délimite les territoires respectifs. Donc décision fut prise de le tailler, de le rafraîchir, de le raccourcir. Pour ce faire on requerra les service d'un professionnel sachant avec dextérité manier la tronçonneuse. Pendant de longues minutes, de très longues minutes j'entendis le bruit du massacre. A chaque fois que le silence se faisait, je me disais c'est bon c'est fini. Je ressentais malgré tout l'angoisse d'un retour imminent. Quelques secondes passaient et la tronçonneuse vrombissait derechef. Mais qu'allait-il rester du noisetier, ramasserai-je encore des noisettes? Le ratiboiseur n'avait-il pas un compte à régler avec les noisetiers? Puis et enfin le silence. Ce silence qui précède la vérité. Il ne me restait plus qu'à constater. Ce que je fis et immortalisais.

samedi 24 octobre 2015

Ratiboisage

Quand j'étais petit... Je me demande jusqu'à quel âge on demeure petit. J'entends la réponse "Ce n'est pas une question d'âge". Rien n'est une question d'âge. J'aime ces phrases qui commencent par rien. Ce côté définitif qui contient tout. C'est vrai. Combien de fois, tout en étant grand, me suis-je trouvé petit. Devenir grand a peut-être cela de commun avec l'horizon que l'on ne fait que s'en rapprocher. Ceci dit, je n'ai rien dit et j'arrête là.
J'ai peut-être commencé à devenir grand le jour où, pour la première fois, c'est moi, et non ma mère, sur instruction de mon père, qui ait décidé d'aller chez le coiffeur. Mon père ne supportait pas les cheveux longs. Il faut entendre par cheveux longs, le cheveu qui vient taquiner l'oreille. J'ai toujours soupçonné mon père d'établir une relation entre cheveux longs et virilité. Toujours est-il que j'allais chez le merlan accompagné de ma mère. Comme un extrait d'"Un jour sans fin" le coiffeur à chaque fois demandait on le coiffe comment, ce à quoi ma mère répondait bien dégagé derrière les oreilles, raccourcir la mèche devant et les pattes et désépaissir le dessus  et pour la nuque on fait quoi demandait inquiet le coiffeur et pour la deuxième fois ma mère utilisait les deux mots bien dégagé. Et commençait le massacre, la déforestation, le ratiboisage, l'éradication capillaire. Avec sa vibration, se mettait en route la tondeuse. Désespéré, je regardais tomber cheveux et disparaître ma tignasse comme disait mon père. Je pensais au lundi matin où j'allais devoir affronter les "quolibets" des copains et les sourires moqueurs des filles. Une fois la dernière mèche tombée et le dernier coup de brosse, le coiffeur se tournait vers ma mère et lui demandait ça va comme ça comme si c'était elle que l'on venait de coiffer. A chaque fois, elle me disait bah tu vois, tu es beaucoup plus beau comme ça, au moins on voit ton visage. Plus beau alors qu'avec mes oreilles j'avais des airs de Dumbo. Nous rentrions à la maison où mon père me gratifiait d'une nouvelle inspection.
Pourquoi ce passage chez le coiffeur? Réponse demain.

jeudi 22 octobre 2015

Proche

Vide. Un sentiment de vide. Quelque part. Un endroit de rencontre. Où les pas disparaissent dans la transparence de ce jour. La violence voile les yeux. Les rires et les voix s'échappent. Une tristesse décharnée s'écoule. La foi s'est mêlée à la terre. J'ai rêvé ta vie. 

lundi 19 octobre 2015

Qui flanche

L'oubli. Est-ce que tu te souviens? Quelques secondes. Est-ce que je me souviens? Non. Mais si, souviens toi. Quelques détails qui devraient stimuler ma mémoire. Ce n'est pas possible que tu aies oublié. Ça ne s'oublie pas. Encore quelques secondes. Oui, peut-être, c'est possible. Je pense lui faire plaisir en ne le laissant pas tout à fait seul avec son souvenir. Mais je vois bien qu'il est déçu. Peut-être même m'en veut-il. Il est au moins agacé. Il y a une minute, il me souriait. Et maintenant, je lis dans ses yeux le reproche. Cette envie de partager. Je n'ai pas envie de me souvenir. Si je pouvais, j'oublierais tout et le reste. Le passé me fatigue. Il est partout. Dans les têtes, sur les murs, dans les livres, dans les albums de photos, dans les mots. Je doute de l'existence d'un premier jour. Le passé forme parfois une brume entre l'horizon et moi. Franchement, que tu ne te souviennes pas, ça me dépasse. Fais un effort. Quel effort veux-tu que je fasse? Il me fixe, comme si avec son regard intense il pouvait extirper ce foutu souvenir de mon cerveau. Et pourquoi voudrais-tu que je m'en souvienne. Je ne sais pas, cela fait partie de notre vie. Les souvenirs font partie de notre vie commune. Ce sont des briques, des témoins, des caresses du temps passé. Si tu te lances dans la poésie... C'est maintenant que j'ai envie que tu me caresses. 

jeudi 15 octobre 2015

Imperceptible

"Je me sens tellement seule que j'ai envie d'être ensemble". C'est ce qu'aimerait dire une pierre. Cette pierre est dans un désert. Elle ne sait pas lequel. En étudiant l'environnement, il devrait être possible de savoir dans lequel elle se trouve. Aujourd'hui, si elle avait des yeux, du haut de la dune elle pourrait voir l'horizon. Un horizon fait de dunes ondulantes. Le désert est une sorte de mer sans eau ni plage. Les dunes font office de vagues. Elles avancent mais ne s'échouent jamais. Elles progressent emportées par le vent. Rien de lunaire dans ce mouvement. La pierre est entourée de grains de sable qui les jours de tempête la recouvrent. Elle peut ainsi disparaître plusieurs jours d'affilés. Elle n'aime pas les grains de sable. Ils l'agressent, la piquent, l'érodent, la harcèlent, la parsèment. Ils sont usants. Il arrive qu'ils la rendent folle. Combien de ses coreligionnaires, adoratrices du temps, ont fini par être réduites en sable. Même si elle ne les côtoyait que de loin, il est des jours où elle se sent seule. Si elle avait de la mémoire, elle se souviendrait qu'elle a été un rocher. Un de ces rochers respectables qui offraient de l'ombre. Aujourd'hui, elle est obligée d'attendre le soleil couchant pour offrir de l'ombre à un scarabée. L'érosion a été si lente qu'au détour d'une aube elle s'est découverte insignifiante. Elle se répand jour après jour par milliers, traverse, survole et se dépose. Si le dernier grain pouvait parler, peut-être se demanderait-il où il veut en venir.  

mardi 13 octobre 2015

Sans les mains

C'est en lisant une étude (en fait un compte rendu) sur la sexualité des iguanes parue en 1996 dans les Proceedings of the Royal Society B que j'ai découvert deux particularités fort intéressantes chez ces sauriens. Le sujet de fond de l'étude était de savoir comment font les mâles non dominants, et donc ne possédant pas de harem, pour se reproduire sachant qu'il leur faut en moyenne trois minutes entre la pénétration et l'éjaculation. Compte tenu du fait que le mâle dominant est très à cheval sur le respect de la propriété privée, le chapardeur ne dispose que de quelques secondes pour éjecter ses gamètes. Alors? Alors il se masturbe, sans y toucher. Il entrepose sa semence dans une poche idoine, ce vaurien et dès qu'il le peut, il saute sur une femelle et vide sa poche. Ainsi délesté, il repart. Autre élément étonnant, il est affublé de deux pénis. Mais il ne peut en utiliser qu'un seul à la fois.
 Je ne sais pas vous, mais je lui trouve un air libidineux.


vendredi 9 octobre 2015

Nadine France

Au début, je n'avais que le titre. Il se suffisait à lui-même. La sobriété me commandait de m'arrêter là. Tous autant que nous sommes, n'en avions-nous pas déjà trop dit, trop entendu, trop lu? Mais il faut toujours que j'en rajoute. Ce qui confirme que lorsque je parle des autres, je parle avant tout de moi. What the fuck! (j'adore cette expression, qu'un site traduit par "que diable"). J'ai longuement réfléchi, ce qui je vous le concède n'excuse rien, et j'en suis arrivé à la conclusion que j'étais Nadine. Je n'irai pas jusqu'à porter un tshirt à son effigie mais ma réflexion m'a fait cheminer jusqu'à la conclusion suivante : je suis responsable de Nadine et de ce qu'elle dit. Mais à quel titre, allez-vous me demander? Ce qu'a dit Nadine est un aboutissement. Elle est allée au plus près du bord de la falaise mais elle n'est pas allée au bord de cette falaise du jour au lendemain. Si au début, elle avait peut-être le vertige, peut-être dis-je, elle a vu tous ses proches qui d'abord s'en approchaient et finissaient par jouer les équilibristes. Alors pourquoi pas moi, s'est-elle dit. Et voilà. Ce qui m'étonne, c'est que ses amis lui refusent de jouer les équilibristes à son tour. Je suis responsable parce que tout cela se passe dans mon pays et que je n'ai rien fait pour l'empêcher. Je n'ai rien dit. Nadine n'est qu'un reflet et chaque jour qui passe, je me dis (je m'en dis des choses) qu'un jour il finira par être trop tard. 

Dire

Je suis là, parfois fatigué, parfois ailleurs. J'aspire à pleins poumons et à être le vent. Je m'engouffre. Je m'engouffre en toi. C'est une gourmandise. A pleines dents je déchire ton parfum. Parfois je n'ose pas. Je me dis... J'essaye de me dire quelque chose mais je ne veux pas m'écouter. Je sais ce que je vais me dire. Il me suffirait de prononcer les mots. Ce que je suis est un livre déjà écrit. Il est là. Il livre les mots de l'ivresse. Je le vois chaque matin, un peu plus poussiéreux que la veille. Pourquoi est-ce si difficile?

mercredi 7 octobre 2015

Approche

Je me souviens de la veille. Je me souviens du matin. Je me souviens de ce temps qui est encore là, qui est toujours là. Je pourrais presque y revenir. Je me souviens qu'il était à peine. Je me souviens qu'il filait comme s'il n'avait jamais dû s'arrêter. Il s'échappait ne laissant que l'ombre. Je me souviens qu'il a pris ton temps. De sa main fuyante, il l'a froissé et jeté. Comme si l'on pouvait en disposer. Comme si c'était sans importance. Comme s'il n'avait jamais été qu'un souvenir. Un doute. Simplement peut-être.

mardi 6 octobre 2015

Ni plus ni moins

En ce jour de tempête, le photographe était impressionné par le marin qui veillait au grain.

lundi 5 octobre 2015

Et puis c'est tout

Le disque est rayé. Je ne peux jamais entendre la fin de la phrase. Les grains de poussière sont comme des puces qui s'agglutinent autour du diamant. Ils virevoltent au-dessus du vinyle. Certains finissent par se déposer dans le sillon noir. Les derniers mots ne sont pas prononcés. Je peux les lire sur la pochette mais je ne le fais pas. J'aimerais les entendre. Entendre la voix. Le jeu de la lumière accompagne le mouvement mais le bras sursaute comme un hoquet sans fin. Certains jours, je patiente. Peut-être la rayure s'estompera-t-elle ou la vitesse de rotation permettra-t-elle au bras de sauter l'obstacle. D'autres fois, un coup de pied provoque une glissade crissante. Ces jours où il faudrait en finir, se rendre à l'évidence. Simplement se dire tant pis.