mercredi 30 décembre 2015

Et plus si

Qu'étions-nous si ce n'est des enfants
Qu'étions-nous si ce n'est l'insouciance
Qu'étions-nous si ce n'est l'instant
Qu'étions-nous si ce n'est l'impatience
Qu'étions-nous si ce n'est les rires
Qu'étions-nous si ce n'est le matin
Qu'étions-nous si ce n'est devenir
Qu'étions-nous si ce n'est des chemins
Qu'étions-nous si ce n'est l'émerveillement
Qu'étions-nous si ce n'est l'éclat
Qu'étions-nous si ce n'est le prolongement
Qu'étions-nous si ce n'est la première fois
Qu'étions-nous si ce n'est l'horizon
Qu'étions-nous si ce n'est l'étonnement
Qu'étions-nous si ce n'est la passion
Qu'étions-nous si ce n'est le temps
Qu'étions-nous si ce n'est sans cesse
Qu'étions nous si ce n'est toujours
Qu'étions-nous si ce n'est la tendresse
Qu'étions-nous si ce n'est l'amour
Que sommes nous si ce n'est...

 

mardi 29 décembre 2015

Rétro



L’autre jour et plus précisément il y a quelques jours, j’ai emprunté le métropolitain parisien. Une fois rentré dans ma province, j’ai pris conscience de mon inconscience. En effet, à aucun moment, ne serait-ce que le temps d’un instant, je ne me suis inquiété, je n’ai scruté intensément le regard et l’attitude des passagers. Nul sac à dos ou autres colis suspects n’a éveillé ma méfiance. J’en frissonne rétrospectivement.Cette absence de citoyenne vigilance est peut-être dû au fait que j'ai pu accéder le plus librement du monde aux quais avec mon sac à dos. Il est vrai que je n'ai rien de suspect si ce n'est...

vendredi 25 décembre 2015

Vide

L'autre matin, j'étais déjà levé. Un de ces matins d'hiver qui traînent à se faire jour. J'ouvre les yeux dans la nuit. Il est pourtant l'heure, cela ne fait aucun doute. J'aimerais me tromper. Comme un infidèle repenti. Je traverse ce temps sans marque. Il me contraint sans exister et se referme après mon passage. Comme s'il n'était que le hasard. Sans l'ombre d'un souvenir. Je passe à autre chose. Dehors, l'air lisse glisse sur mon visage. Il m'apaise. Le mouvement d'une vie. Il précède l'éveil de cette autre lumière.




mardi 22 décembre 2015

Merlan

Ce matin? Ah oui, ce matin. Je ne fus pas très attentif. Comme le dit mon coiffeur, être attentif le matin n'est pas à la portée de toutes les attentions. Comme tous les matins je me suis levé du pied gauche. On ne peut pas dire que ce soit par habitude mais plutôt par inadvertance et manque d'attention. En revanche c'est par habitude que j'occupe la partie gauche du lit. J'ai déjà essayé de dormir à droite mais j'ai à chaque fois ressenti comme une gêne doublée de la peur de me retrouver plus à droite et de finir par tomber plus bas. Et au milieu j'ai le sommeil hésitant. En revanche, chaque soir avant de m'endormir, après c'est trop tard, je me dis "Mon garçon, demain matin tu prendras soin de te lever du pied droit". Je suis un homme de résolution. Malheureusement, à l'instar de l'ONU, je les mets rarement en application. C'est ainsi que chaque matin, comme ce matin, je me lève du pied gauche. A chaque fois je m'en veux, je peste, je vitupère contre ma légèreté, mon inconséquence mais rien n'y fait. Mais là n'est pas le sujet. Hier soir, comme chaque soir, je me suis lancé un défi. Je devais me souvenir de ma première pensée matinale. Alors ce matin... Ce matin, rien. Pas la moindre pensée, l'esprit dans la brume. Le radar jusqu'à la salle de bain. L'envie de ne penser à rien. Je remets ça demain. Il faut simplement que j'y pense.

Martine au pôle





Martine, qui venait du sud, passa la Loire pour débarquer plus au nord. La mission de Martine? Réunir en une seule banquise la Basse-Banquise et la Haute-Banquise. Plus personne ne se souvenait pourquoi elles avaient été séparées. Les plus anciens parlaient d'un obscur découpage de circonstance. D'autres affirmaient qu'un dérèglement était à l'origine de cette séparation. Quoi qu'il en soit, Martine n'avait que faire de tous ces vagues souvenirs emprunts de nostalgie. Réunifier était sa mission et envers et contre tout elle l'accomplirait. Elle ne pouvait faillir. Si elle avait été choisie, ce n'était pas par hasard. Elle allait s'atteler à la tâche. Plus précisément, elle allait diriger la réunification en évitant autant que faire se peut de mettre les mains dans la neige. Pour ce faire, elle s'adjoignit les services de Croc Béant, spécialiste reconnu du changement immergé et réputé pour raboter les intelligences qui sortent du rang. Pendant ce temps, les pingouines et pingouins de la Basse-Banquise ainsi que les pingouines et pingouins de la Haute-Banquise, appliqués et consciencieux, tout à leur besogne, laissaient transparaître une relative mais réelle inquiétude. Bien sûr, pimpante, souriante et la main de fer sur le cœur, Martine leur avait assuré que la réunification ne changerait rien à leur quotidien, qu'ils pourraient continuer de vaquer tranquillement et comme avant à leurs occupations. Mais il ne fallait pas prendre les pingouins pour des manchots. Jusqu'ici et de toute éternité, du moins depuis que les pingouins étaient pingouins, ils s'étaient toujours appliqués à confectionner des nids ronds. Certes, ces derniers étaient perfectibles. Mais faisant montre de bonne volonté et bien que grégaires, les pingouins avaient toujours affiché leur inlassable volonté de progresser pour que le nid rond soit de plus en plus propice à l'autonomie des futurs pingouins. Preuve en est qu'ils faisaient de leur mieux pour améliorer l'Ice Cool Température, plus connu des initiés sous le sigle ICT. Mais passer du nid rond au nid carré sans en connaître ni la composition ni les mesures laissait pour le moins perplexe le pingouin de base. De là à leur demander de produire des œufs carrés... Afin de ne pas rester les ailes ballantes, ailes déjà bien atrophiées par d'autres réunifications, les pingouins sollicitèrent leurs représentants pour qu'ils fassent part à Martine de leur désaccord. C'est ainsi que ces représentants, notamment la Confédération des Givrés du Travail, montèrent sur l'igloo pour faire valoir les encore timides revendications de la base. Il ne s'agissait pas dans leur esprit de geler le projet mais de le coconstruire. En quelque sorte, les pingouins prônaient le pari de la confiance. Ce début de contestation allait-il faire boule de neige?  

lundi 21 décembre 2015

Karma

Ce matin. Le chemin m'a paru long. Je n'étais pas pressé. Me dégageant mollement du sommeil, je me suis assuré de ma présence. C'est ça, le thème du jour serait le présent. Toute la journée je serais présent. Là, à chaque instant. Chaque instant serait présent. A tout instant je serais dans l'instant. Je resterais dans les limites de chacun d'eux. Je sautillerais d'un instant à l'autre, veillant à ce que le précédent soit bien terminé. Surtout ne pas me précipiter. Prendre garde à ne pas me retrouver par inadvertance dans l'avenir, ne serait-ce que du bout du pied. Ce matin, j'étais ambitieux. A moi seul, à moi tout seul je serais le présent qui n'en finit pas. Une orgie de présent. Je dois avouer qu'au bout d'un moment, comme un trop-plein d'oxygène, tous ces instants m'ont donné le vertige. Je me suis assis. Le jour qui s'éclairait m'a soufflé à l'oreille que pour une première fois, toute une journée de présent ce n'était peut-être pas raisonnable. Même s'il avait raison, j'avais envie de me shooter, de me gonfler les veines, de m’exploser les naseaux, de me déstructurer l'hypothalamus. Alors, j'ai continué. Je les ai tous enfournés, dévorés tous ces instants. Ce soir je suis rincé. Rien gagné, rien perdu, je suis le temps présent. 

Ne serait-ce que cela

Ne serait-ce que cela. Au tout début. Au début. Sans but. Et même après. Irise le froid du matin. Décortique les corps en désaccord. S'éloigne des étirements. Quand nous étions là. Encore incertains. Sur le chemin, les pierres comme de prières qui s'égrènent. Écorchent la peine et s'éparpillent dans la plaine. Les oublis s'amoncellent dans le creux de ton épaule. Les matins éclairent l'entrée du vide. Surgit la dérision, cette érosion des illusions. Ce que nous étions s'éloigne du rivage, balayant l'écume de la rage.   

dimanche 20 décembre 2015

Tout à la foi

Tout à la foi
Moi n'existe pas
Ou, allant de soi
A l'ombre de toi
Dans un pas à pas
Jusqu'à l'au-delà
Entendre ta voix
La brume décroit
Cache ce que je vois
Encore un peu froid
Ruisselant de foi 
En partie las
J'oublie pourquoi

vendredi 18 décembre 2015

Discours départ en retraite

Cher Alain, si tu me permets de t'appeler Alain, je vais commencer par parler de moi, et ce n'est pas sans émotion que six ans après mon départ je reviens en ces lieux où j'ai sévi à tous les étages et dans de nombreux bureaux, bureaux individuels, à deux, à trois, à quatre et plus selon affinités. Je peux dire que, dans tous les sens du terme, ici pris mon pied j'ai. Pour ce qui te concerne je ne sais pas ce qu'il en a été mais puisque tu vas d'ici peu partir en retraite, cela veut dire qu'il n'est pas loin d'être trop tard pour la prise de pied. Mais cette fois-ci, ce n'est pas pour le plaisir que je suis revenu. Alors que le samedi 30 juin, comme chaque samedi, je feuilletais les dernières publications du journal officiel, quelle ne fut pas ma surprise de découvrir que tu étais radié. A-t-il oublié de pointer me demandai-je. Je continuai ma lecture pour découvrir que tu étais radié, oui mais des cadres. C'est ce qu'on appelle, faute de mieux, tirer un trait.  Et oui, tu vas partir en retraite, autant dire que tu vas disparaître des écrans radar. Disparaître peu à peu des mémoires. Un jour le plus vieux des plus vieux en activité dira "Tu te souviens d'Alain Ninauve?". Son interlocuteur lui répondra "Qui ça?" et le plus vieux des plus vieux en activité en viendra à douter que tu aies jamais exister. C'est notre lot commun.  Retraité tu vas devenir. Et qu'est-ce qu'un retraité si ce n'est un vieux qui jour après jour le devient un peu plus? Et quelle est la principale occupation d'un vieux si ce n'est d'attendre la mort en espérant qu'elle soit douce et clémente. Arrive un jour où si l'on veut revoir ses anciens collègues le plus sûr est d'aller au cimetière.


Voici donc en guise d'introduction. Comme le dit Jean-Marc, avec une légère touche de vulgarité de bon aloi, une fois faite l'introduction ça glisse tout seul. Du moins en règle générale. Pour tout dire, en commençant la rédaction de ce compliment, j'avais l'intention de relater ton œuvre au sein de ce ministère devenu protéiforme. Mais j'ai dû rapidement me rendre à l'évidence que la tâche serait immense, insurmontable tant ton œuvre est monumentale, indicible, tant elle défie l'entendement. Ne souhaitant pourtant pas renoncer, j'ai fait le tour des services pour recueillir quelques témoignages. Si dans certains bureaux j'ai été accueilli comme un patron par un IT de l'Eure affilié à la CGT, j'ai malgré tout eu droit à quelques sourires jusqu'à ce que je prononce ton nom. Pour tout dire, si je retire ceux qui ne te connaissent pas et ceux qui pensaient que tu étais déjà parti, il reste... Il reste les autres. Après réflexion, pour que tu finisses sur une bonne note, j'ai préféré faire appel, appel à quelques dates et à mes souvenirs. Avons-nous les mêmes? Rien n'est moins sûr. Après une jeunesse rythmée par les turpitudes de la promiscuité avinée qui règne dans les corons, ce qui explique beaucoup de choses et qui justifie notre indulgence, et  une scolarité fantaisiste et plutôt orienté langue à Valencienne, navigant entre deux veines,  tu vas errer quelques années entre Maubeuge et Valenciennes. Puis hasard, concours de circonstances, en 84 du siècle dernier, tu vas intégrer l'INTEFP. Tu vas alors dévorer le code du travail qui, il faut le dire, ne fait encore que 250 pages, code qui quelques années plus tard deviendra la principale cause du chômage dans notre pays, les tenant de cette perspicace théorie, voyant rouge, n'hésitant pas à mettre le dit pensum sur la balance pour donner plus de poids à leur argumentation. En 85 toujours du même siècle, tout auréolé du titre d'inspecteur, tu vas aller sévir au pays de la moule à l'occasion nappée de crème. Face à la plage, tu vas écumer tous les estaminets dans les cuisines desquels prolifèrent presque aussi rapidement travailleurs au noir et coliformes. Après maints PV, mises en demeure et constats d'entrave, tu vas rejoindre la direction régionale qui à l'époque est celle du travail et de l'emploi qui est un des plus célèbre oxymore. Donc à la DRTE tu occupes la fonction d'organisateur régional. Encore aujourd'hui, malgré des fouilles approfondies, comme le dit Rocco, on est encore dans l'incapacité de déterminer ce que tu as organisé si ce n'est ton départ. C'est quelques mois avant ton départ que pour la première fois tu seras brièvement mon chef de service à l'occasion de la création de la DRTEFP, née de l'incestueuse fusion DRTE/DRFP, nouvelle entité qui traînera les stigmates de la consanguinité. Donc en 95, tu vogueras vers le pays des champignons, à savoir Tahiti. Ce que tu fis à Tahiti, nul ne le sut jamais et pour tout te dire, garant d'une certaine morale, je préfère ne pas le savoir. Il y a bien sûr des rumeurs comme quoi t'exhibant devant les vahinés vêtu d'un pagne de taille réduite qui laissait poindre tes intentions...Ensuite, délaissant le siècle dernier, tu vas revenir vers la civilisation en réintégrant la DRTEFP. En tant que directeur adjoint tu vas devenir mon chef et par la même occasion je deviendrai ton subalterne, ton exécutant, parfois des basses œuvres. Tu auras en responsabilité un certain nombre de choses dont le célèbre dialogue social qui dans notre pays s'apparente davantage au monologue social. Pour tout te dire tu as été un chef que j'ai apprécié car tu m'as toujours foutu la paix. Même si je n'ai jamais réussi à me faire une idée précise de tes compétences, je te rassure cette constatation s'applique à la quasi totalité des chefs car je pense que personne ici ne me contredira en disant que la principale fonction d'un chef est d'être nul. Combien de fois ai-je entendu un fonctionnaire sortant du bureau de son chef en marmonnant qu'est-ce qu'il est nul, le chef en question en ayant autant à son service.
Ensuite nos chemins se sont séparés. Je suis allé rejoindre d'autres nuls et toi tu es resté avec les tiens.
Voilà, c'est la fin. Il faut savoir dire stop. Comme le disait le docteur Ogino, il faut savoir se retirer, même, et je le conçois aisément, si cela peut s'avérer frustrant. Mais rassure-toi, le devoir est accompli. Et puis, jusqu'à un certain point g parfois, retraite et plaisir peuvent faire bon ménage.    
               


jeudi 17 décembre 2015

Sniffe (c'est de la bonne)



J'ai certaines fascinations que je ne m'explique pas. A l'évidence, il doit y avoir du freudien là-dedans. Tout petit déjà, encore à peine conscient de ma condition, je tournais mon regard vers l'Est, bien au-delà de l'Oural. Partie d'Odessa, la dictature avait fini par se répandre à portée de missiles. Elle se drapait dans le formalisme démocratique, usait de mots et de formules. Au gré des purges et des procès, disparaissaient des visages, s'enfuyaient des ombres, étaient réhabilitées de grises silhouettes. Malgré les constitutions, les instances, les assemblées, les plénums, les comités, les bureaux politiques et autres commissions, l'immobilisme était d'acier. Dès que je sus lire "Vladimir Illitch Oulianov" c'est à dire à cinq ans, aucun écrit concernant les démocraties populaires ne m'échappa. J'éprouvais un plaisir qui pouvait aller jusqu'à la jouissance à prononcer tous ces noms de dirigeants  Malenkov, Kossyguine, Gromyko, Podgorny, Malenkov, Boulganine... J'étais capable d'en citer des dizaines. Je n'ai jamais réussi à faire partager cette passion à mes camarades. Écroulé le mur, ma fascination prit un caractère nostalgique, rétrospectif. Bien sûr, il me restait la Corée du Nord qui ne manquait pas d'attraits mais ce soupçon d'exotisme dont se paraient ses dirigeants empêchait mon adhésion sans réserve, altérait une possible passion. Pourquoi tout cela?
Parce que pas plus tard que lundi, alors que l'on avait la veille tenté d'attenter à je ne sais plus quoi, j'entends parler d'éviction, de mise à l'écart, d'élimination, d'épuration. En moins de temps qu'il n'en fallait à Marchais pour serrer un boulon chez Messerschmitt, ressurgissent les souvenirs des procès des blouses blanches, du procureur Vychinski et autres contempteurs de la liberté d'expression. Et qui chez nous dans le rôle du coupeur de têtes qui dépassent? Notre républicain en chef, notre petit père des pleutres. La purification idéologique faite, il définira la ligne du partie. La ligne du partie! Comme au bon vieux temps du politburo ( Политбюро dans le texte). Cette ligne blanche, cette ligne, droite comme un échafaud. au bout duquel se balance la diversité. Vous aurez remarqué la diversité des éléments qui composent l’acronyme NKM.   

mardi 15 décembre 2015

Prenons-le

Heureux. Être heureux. Tel quel. Comme ça. Sans rien de plus. Ne serait-ce qu'un instant. Un instant présent. Le temps de dire je t'aime. Le temps de ton sourire. Le temps de mon étonnement. Le temps de ton hésitation. Le temps t'effleurer. Le temps de ton chuchotement. Le temps de mon souffle. Le temps de ta bouche. Le temps de mon impatience. Le temps de ton agacerie. Le temps de mon culminant. Le temps de ton delta. Le temps de notre enlacement.

dimanche 13 décembre 2015

Matin gris

Là les débris
Comme un fouillis
Pris dans les plis
Un reste de vie
Épars dans l'infini
Je t'en supplie
Quand le jour finit
Ne répands pas l'oubli




vendredi 11 décembre 2015

Quand même

Hier matin, mû par la force de la nécessité, je pénétrai dans le métro, passant du quai à l’habitacle. Les écouteurs sur les oreilles, je me confinais dans un isolement. Il me restait les yeux pour maintenir le contact avec mes congénères (j'aime bien ce mot, allez savoir pourquoi). J'ai à de nombreuses reprises constaté qu'il ne me suffit d'avoir les yeux ouverts pour voir. Rien là que de très banal mais qui chaque fois m'étonne. Où vont se nicher toutes ces choses, tous ces visages que j'ai certainement vus sans m'en souvenir. En ce matin d'affluence où les corps se côtoient en évitant de se toucher, tout en écoutant "Normal person" d'Arcade Fire, je regardais. Je regardais les autres. Je regardais leur visage. Je suis toujours étonné par leur diversité. Les visages sont des œuvres d'art, abstraites ou figuratives, façonnés dans des moments d'émotion. Il serait dommage de s'en priver. Je les regardais donc. Peut-être avec trop d'attention. Une jeune fille m'a rendu mon regard. Il m'a semblé déceler dans le sien de la gêne. M'a-t-elle pris pour un gros dégueulasse, un pervers. Je me suis retrouvé gêné à mon tour et j'ai détourné le regard comme un coupable. Je ne savais plus quoi regarder. Me parvenait dans les oreilles "The great gig in the sky".  

jeudi 10 décembre 2015

Un soir à l'hôpital (2)

 Donc, que faisais-je là? J'étais au milieu de chefs d'entreprise et de salariés, de soignants et d'entremetteurs en scène qui tous avaient participé et partagé un projet, sur lequel je reviendrai. Je les ai écoutés et j'ai retenu leurs mots qui m'ont inspiré. Il était question de l'hôpital et de la culture. Ou plus exactement de la culture à l'hôpital. Tout comme l'air que nous respirons, la culture devrait pouvoir se répandre dans tous les espaces, dans tous les lieux. Tous les lieux devraient être ouverts à la culture. Pourtant, toutes les portes ne s'ouvrent pas spontanément. Il revient alors à la culture de façonner la clef qui lui permettra d'entrer. Si la culture peut souffler, provoquer, s'engouffrer, se glisser dans les entre-deux, elle ne peut le faire par effraction. Surtout là où on ne l'attendrait pas. Et l'hôpital est un de ces mille lieux. Un de ces lieux à priori dénué de plaisir, où si l'on y éprouve l'envie, c'est celle d'en sortir le plus vite possible. Et pourtant, l'hôpital est un lieu de vie et la culture fait partie de la vie. Elle prend soin de nous. Elle révèle, elle nous révèle notre humanité. Elle nous offre le désir du plaisir. Le plaisir d'aimer ce que l'on découvre. L'hôpital et la culture sont faits pour se rencontrer, pour se mêler, pour s'imbriquer et faire tomber les murs de réticences, de méfiances. Le long des couloirs pour pousser les portes et se rencontrer. Ce projet, qui a impressionné le temps, a provoqué l'étonnement des participants. L'étonnement que la culture puisse nous rendre si proches dans la beauté. La culture est une éternelle inconnue.

mardi 8 décembre 2015

Un soir à l'hopital. (1)

Donc, hier soir je suis allé à l'hôpital. Il n'y avait pas d'urgence mais la curiosité l'a emporté. A vrai dire, si j'étais curieux, je ne savais pas trop de quoi. Nous appellerons cela la curiosité de l'inconnu. Peut-être l'inconnu qui me ferait oublier ce connu. Ce connu qui depuis quelques jours me donne la nausée. A propos de nausée, je me suis retrouvé dans le service de cancérologie digestive où, dans un premier temps, j'ai été invité à écouter un récital introductif de piano. Sans peine, je me suis laissé bercer. J'écoutais et je regardais. Je regardais le dos que prolongeait un profil dont je devinais le regard parcourant la partition pour abolir toute frontière. Je regardais les doigts qui se déplaçaient sans avoir l'air d'y toucher. Je ressentais ce plaisir que l'on éprouve quand, à la fois, on peut écouter et voir.
Alors donc, que faisais-je là. ?

samedi 5 décembre 2015

Simplement

L'autre jour, alors qu'hésitant mes doigts caressaient les touches, par le plus grand des hasards j'ai écouté Sophie Hunger, qui n'est pas ma voisine mais une chanteuse dont, à ma grande honte, j'ignorais l'existence. Il semblerait que j'étais le seul. A chaque fois que je dis que je viens de la découvrir, l'on me répond "Quoi, tu connaissais pas Sophie Hunger?". J'ai décidé de garder cette découverte pour moi. Je l'écoutais donc. Je me suis laissé bercer par sa reprise de "Le vent nous portera". Quelques Mo plus loin, je tombe sur une autre reprise, à savoir "La chanson d'Hélène" avec en voix additionnelle Cantona en lieu et place de Michel Piccoli. Il peut m'arriver d'apprécier Cantona mais là... Donc, que fais-je? Je regarde et écoute la version originale. Et là, comment vous dire...Il est question d'amour, de la fin d'un amour qui est aussi déchirant, aussi bouleversant que le début d'un amour. Et je revois Romy Schneider. Son visage, son regard, son sourire. Tout en elle exprime son amour pour Michel Piccoli. Une femme amoureuse est belle (j'ose), entière et définitive. Alors que nous les hommes, je n'aime pas les généralités mais là (3ème là), en amour nous sommes des bites. C'était pour dire. 

https://www.youtube.com/watch?v=VsWZcwPL7-Q

vendredi 4 décembre 2015

Un soir aux verts

Donc, mercredi soir je me suis retrouvé dans ce que par commodité j'appellerais une réunion organisé par les verts. J'y suis allé en voiture. Mauvais point. J'y suis allé pour faire plaisir. J'aime bien faire plaisir. Si ce n'est que faire plaisir ne lutte en rien contre le réchauffement climatique. C'est même parfois le contraire. J'y suis aussi allé car était prévue la présence d'Olivier Saladin. J'aime bien Olivier Saladin. Il me fait rire et sourire. Autant le dire tout de suite, pour ce qui est du rire, il n'est pas venu. Il restait le sourire. J'ai dû sourire. Quand j'ai débouché une bouteille et que le cidre a giclé. Jai le sens du gag. Dans le théâtre du P'tit Ouest, nous étions assis. Sur la scène quatre personnes dont Saladin et le leader régional des verts. Cette soirée avait été conçue non comme électorale mais comme un moment d'échanges, chacun des quatre et des membres du public lisant des textes. Des textes plus ou moins judicieux dont aucun ne m'a fait rire. Ce n'était peut-être pas l'objet. J'ai souvent l'impression que les écologistes ont peur de faire de l'humour. Et ce que je me demande à chaque fois, pourquoi un écologiste ressemble-t-il à un écologiste, dans sa façon de s'habiller, dans sa façon d'être, dans sa posture? Pour tout dire, l'écologiste ne m'a jamais donné envie. Après la lecture, comme il se doit nous avons bu et mangé des produits naturels fournis par de petits producteurs locaux. Le producteur local est toujours petit. C'était pour dire.

mercredi 2 décembre 2015

Incertain

Tout en haut des crimes
Les jours déclinent et déciment
Dans un fracas sublime
Nos cris s'abîment 
Se perpétuent les cimes
Que le temps imprime
Comme des images
Quand défile notre film
Et je rêve de tes mensonges
Qui traversent mes songes
En allant vers l'endroit
Où mes yeux voient l'effroi 
Je me rends compte
Dans l'ombre de ma honte
Que tout va de travers
Le long des golfes amers
Pour finir l'intrigue 
Je discerne la fatigue
Autour de tes yeux
Quand l'amour est un aveu

mardi 1 décembre 2015

Moisi et rance

Hier soir à Rouen il y avait comme une odeur de moisi et de rance. Comme un écho du journal de JP Pernaut. 
« la bien-pensance a fait des ravages », « les valeurs chrétiennes de la France » et son « long manteau de cathédrales et d’églises », « défendre l’identité nationale » et les « racines » de la France, « Nous voulons rendre la France de toujours au peuple de France. » « Je ne veux pas que la France devienne une société multiculturelle car je ne veux pas du communautarisme". Il ne manquait plus que la glorification de "la terre qui elle ne ment pas"
A croire que Patrick Buisson est revenu en odeur de sainteté dans les coulisses. Pour tout dire, j'ai cru qu'il avait procédé à un copié-collé d'un discours du maréchal. Mais qui ça "il"? Vous ne devez pas avoir besoin d'autres indices. Faut-il avoir si peu de respect pour son auditoire pour aligner ainsi les formules pêchées ici et là pour compenser l'absence d'analyse. Le céder à la facilité, à la paresse intellectuelle, déterrer sans vergogne la dépouille miteuse du vichysme (moi aussi j'aime bien les formules) aiguise cette envie, ce besoin irrépressible de désigner des coupables. Était-ce bien utile de venir jusqu'à Rouen...