mardi 3 mars 2015

Smack un

Tout petit il rêvait d'une princesse charmante. Alors il attendait. Il faisait de son mieux et attendait. Au début, le fait d'attendre en vain ne l'affectait pas. C'est à peine s'il était déçu d'être chaque matin réveillé par le baiser de sa maman sur la joue. Ce qui pour l'avenir était rassurant est qu'un simple baiser suffisait à le sortir du sommeil. Mais il lui arrivait de répondre par un grognement à cette marque de tendresse. Alors, vous imaginez la réaction d'une princesse charmante en pareille circonstance. Elle risquait de partir sans demander son reste. Ce qui serait d'autant plus dramatique s'il n'existait qu'une seule princesse charmante pour chaque bel endormi. Avec abnégation et plaisir, il s'astreignit à gratifier chaque matin sa mère d'un sourire étonné jusqu'au jour où cela devint naturel. Il pouvait ainsi s'endormir chaque soir sans appréhension.Les matins continuaient de se succéder.
Le temps finit par passer si vite qu'un matin, il prit conscience qu'il avait de nouvelles préoccupations, nombre d'anciennes ayant quitté son esprit. L'attente du baiser de princesse, de l'être aimé, de l'amour étaient plus que jamais là mais aussi autre chose. Cette autre chose qui pouvait le rendre fébrile et même faire naître en lui de l'impatience.
Un matin, alors qu'elle venait de déposer un baiser sur sa joue, il regarda sa mère. Il la regarda comme si... Il ne permit pas à sa pensée d'aller plus avant. Même si elle n'était qu'esquissée, il la regretta.  
Il chercha des raisons à cette vaine attente. Il changea de lit, de chambre, alla dormir ailleurs, dormit sur le dos, sur le ventre, fit semblant de dormir, le fit nu, habillé, à même le sol, sous le lit. Rien n'y fit. Allait-il désespérer? Cette absence de princesse pouvait-elle être de son fait? Un matin, avant même d'entreprendre quoi que ce soit, il se regarda dans le miroir de la salle de bain. D'accord, il n'était en rien une beauté de papier glacé. Se reculant de quelques pas, il concéda qu'il ne possédait ni les attributs ni la plastique d'un apollon. Pour autant, il n'était pas dénué de charme, du moins était-ce son appréciation de ce qui lui était donné de voir. Il est vrai qu'il n'avait pas eu le loisir de se confronter au jugement des autres. Bien sûr, sa mère le trouvait très beau, mais quel crédit pouvait-on donner à cette évaluation?
Un jour, en son for intérieur, alors que se perpétuait l'immuable enchaînement des évènements matinaux,  il reformula son attente.  

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