mardi 16 mars 2010

Photographies


Jean Ferrat est dans mon album photos. Des photos en noir et blanc aux bords crénelées. C'était l'époque des photos que l'on pouvait regarder mais qu'il était formellement interdit de toucher, sous peine de claque sur la main. Les photos, je ne sais pourquoi, devaient être vierges de toute trace de doigts. A partir d'un certain âge, il était possible de les tenir entre deux doigts mais toujours sous le contrôle d'un adulte qui, toutes les trente secondes, vous disait menaçant "Attention où tu mets les doigts!", phrase qui est à l'éducation ce que le couteau suisse est à la coutellerie.

Encore petit, au début des années soixantes, temps du poste de radio à transistors, tout à mon chocolat et à mes tartines, me pervenait parfois la voix de Jean Ferrat. Deux enfants au soleil. Regardant le beurre ouvrir les yeux dans mon bol, j'ai d'abord retenu "La mer sans arrêt
Roulait ses galets"


Puis, ma préférence est allée vers "Et c'était comme si tout recommençait" Ce sont des mots, un vers, un message qui me donnaient envie. Jean Ferrat avait une façon de chanter cette phrase qui me donnait l'impression que d'un souffle il se libérait, qu'il soufflait une vague d'espoir. Comme si le simple fait d'avoir prononcé ces mots lui insufflait toute l'énergie qui redonne foi en la vie. Bien sûr, ce n'est qu'après de nombreux matins et d'aussi nombreux chocolats que j'ai pris conscience de cela. Même si au début je me laissais simplement bercer par les sons, je n'ai jamais laissé s'échapper cette chanson.

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