samedi 14 novembre 2009

Ces mots qui font des phrases

Passe droit : faveur accordé contre le règlement, contre le droit (le Petit Robert).

En 2007, 622 salariés ont péri dans un accident du travail. Sur les 720 150 accidents avec arrêts enregistrés, pour 35 871 141 journées d'indemnisation, 46 426 ont entraîné une incapacité permanente. La plupart des accidentés proviennent des métiers dits d'exécution. Les victimes d'un accident du travail ne perçoivent que 60 % à 80 % de leur salaire et tous, et notamment les plus modestes, n'ont pas de mutuelle complémentaire. Dans un avis rendu, le conseil économique, social et environnemental a conclu que les indemnités journalières "ne compensent donc que partiellement la perte de rémunération due à l'accident et la défiscalisation contribue à atténuer la perte de revenu ainsi engendrée."

A propos de ces indemnités notre ami Jean-François Copé a qualifié de passe droit le fait qu'elles soient "défiscalisées" et qu'il fallait en finir. Il a donc, avec l'aval de l'éxécutif, fait voter la "fiscalisation" de ces indemnités ce qui répond à un souci d'économies, d'équité et de bon sens.

Ayant revêtu le costume du bon sens qui lui va si bien, il nous gratifie d'un raisonnement qui, si l'on ne prend la peine de réfléchir, est imparable. L'indemnité est un revenu de substitution. C'est donc un revenu. Tout revenu doit être soumis à l'impôt. Donc... Je suggère au gars Copé que cette nouvelle réglementation soit rétroactive.

L'utilisation d'un simple mot, passe-droit, accrédite le fait que les accidentés du travail étaient davantage que des privilégiés, ils étaient des profiteurs, des hors la loi. Si l'on pousse cette logique, tout accidenté du travail devrait être poursuivi en justice. Ce qui était un droit est devenu une fraude. En qualifiant de passe-droit ce qui était un droit, notre ami Copé désigne des coupables, nous indique les mauvais français. La recherche de coupable est constante. Cette volonté de chercher à nous opposer les uns aux autres, à créer des catégories qui n'ont pour objet que d'attiser les rancoeurs, parfois les haines contredit cet autre discours sur l'identité nationale.

Pourquoi avoir utilisé ce mot? En le prononçant, Copé met en doute l'honnêté, l'intégrité morale de salariés qui contribuent dans leur chair à cette croissance dont nous devrions, semble-t-il, être si fiers.

Copé, qui est-il?

Aucun commentaire: