vendredi 4 novembre 2016

Devant l'autre

Ce matin, après une interruption de deux mois due à une décrépitude physique progressive et irréversible, je suis allé courir. Affrontant l'inconnu mais chaussé de chaussures neuves, je partis confiant. Les premières foulées confortèrent ma confiance. Mais, malgré une tentation très forte, j'aime être tenté, j'adoptai un rythme de foulées somme toute raisonnable et adapté à mon état. L'air caressait mon visage. Mes jambes avaient la légèreté des promesses vespérales. Au cours des premières minutes, je visualisais le parcours envisagé. Les quelques difficultés qui le parsèment muselaient cette euphorie que fait naître un afflux d'endorphine dans les veines qui soudain se dilatent et propagent une sensation de puissance. La vue de la première bosse n'entama en rien le plaisir que me transmettait mon sang. Je devinai une augmentation du rythme cardiaque, la puissance des battements qui assuraient la nerveuse irrigation de mes membres en mouvement. J'étais parvenu à cette seconde pendant laquelle j'étais un corps sans âge, libéré des contraintes et autres vicissitudes. J'aurais dû m'arrêter à cet instant précis. J'ai continué. Le haut de la côte sur lequel devait souffler le triomphe de l'athlète à l'ample foulée dut se contenter de mon souffle court. Je poursuivis, désormais dépourvu de tout esprit conquérant. Demain me verra-t-il perclus de courbatures? 

Aucun commentaire: