dimanche 10 janvier 2010

Moi émois (23)

L'eau est encore chaude. Elle sera bientôt tiède. Je n'aime pas l'eau tiède. Je n'aime pas ce moment incertain qui va jusqu'à troubler la sensibilité du corps. Imperceptiblement, elle deviendra froide. Je ne bougerai plus, pour échapper à cette sensation. Un liseret de crasse mêlée de savon, comme aimanté, fera surface à la périphérie de la baignoire. Ce ne sera plus qu'une eau morte. Le bain me déprime. La réputation de cette ablution est surfaite. La baignoire, je ne sais pourquoi, évoque le luxe, la volupté, la sensualité. Cléopâtre n'y est peut-être pas étrangère. Et pourtant cela se termine toujours dans une sorte de bouillon bleuâtre, comme un fluide qui nous résumerait.

Je ne sais pas pourquoi je pense à cette eau qui va refroidir. Je navigue entre le passé et l'avenir, entre le regret et l'espoir. Comme si je voulais accélérer le temps, le devancer. Comme ceux qui m'ont précédés, j'ai souvent ou toujours été en lutte contre le temps. A force de vieillir, l'avenir s'est tassé, prenant de moins en moins de place. Il finira par disparaître. Il n'est plus là que pour la galerie, comme une anomalie qui flotte dans un bocal de formol. J'ai peine à le croire quand je me souviens de la vigueur de cet avenir. Il était si souvent envahissant que mon présent finissait par empiéter sur le passé qui, à mesure que le temps passait, prospérait. Je devais lutter pour ne pas être écrasé par ce qui avait été et ce qui serait.

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