mercredi 10 février 2010

Moi émois (24)



Je me souviens d'un tableau. Vanité. Le Caravage. C'est en me voyant dans ce bain que le souvenir remonte à la surface. Je me demande si, une fois dévoré, décomposé, si, une fois qu'il ne restera plus que la charpente, l'on pourra me reconnaître. Mon crâne me ressemblera-t-il? Continue-t-on d'exister après sa mort? La mort n'engendrerait-elle que des questions? A bien y réfléchir, les réponses m'importent peu. La mort est une question. Je m'en rapproche un peu plus chaque jour mais elle me semble toujours aussi lointaine. Au bout de combien de temps n'est-on plus présent dans aucune mémoire? Existe-t-il une dernière seconde de présence dans une mémoire avant de disparaître? Le dernier souvenir meurt avec celui qui le porte.

J'imagine la dernière personne quittant le cimetière après mon enterrement. Je serai là tout frais dans sa mémoire. Cette personne n'avait pas pensé à moi depuis longtemps. Ce n'est qu'en lisant l'avis de décès dans le journal qu'elle s'est souvenue de moi. Sans trop savoir pourquoi, elle a participé à la cérémonie. Certains visages de l'assistance lui disaient vaguement quelque chose. Pour eux aussi, le temps avait passé. Peut-être ne pensera-t-il pas une seconde à moi pendant que l'homme en aube me recommandera à dieu. Je serai revenu sur le dessus sa mémoire, comme une bulle d'air qui s'arrache à la vase pour venir éclater à la surface, après avoir végété de longues années dans un méandre déserté de son cerveau comme le bras mort d'un cours d'eau. je serai en sursis dans sa mémoire qui finira par m'effacer comme un souvenir inutile

Aucun commentaire: