mardi 7 juillet 2009

Les empruntés

Comme tout bon citoyen, vous avez écouté notre président s'exprimant devant le congrès réuni. Attentifs et préoccupés par l'avenir de notre pays, vous avez retenu...l'idée de l'emprunt. Une riche idée que celle de l'emprunt. Quel meilleur moyen, si cette option est retenue, pour nous de prouver notre patriotisme, notre patriotisme économique en souscrivant à cet emprunt populaire. Nous prêterons le fruit de notre travail pour financer des investissements qui eux-mêmes créeront de l'emploi. Enfin l'occasion de montrer au monde que nous sommes tous unis derrière notre président.

Ceci dit, j'ai, à la réflexion, trouvé que notre président avait manqué d'ambition et de confiance en ses concitoyens pourtant prêts à tous les sacrifices pour que leur pays sorte au plus tôt de la crise. Notre président aurait pu lancer un prêt à 0% d'intérêt. Ou plus audacieux, mais sur la base du volontariat, il pouvait lancer un "emprunt" dont les souscriptions auraient été composées de dons. Quoi de plus symbolique, de plus exaltant, de plus fédérateur que le désintéressement pour le bonheur de tous. Juste retour des choses, nous qui devons tant à la société.

Quoi qu'il en soit, l'annonce de cet emprunt a, pendant quelques secondes, revigoré ma confiance et proprement dopé mon courage. Quelques secondes seulement car notre président nous a en quelque sorte avoué qu'il n'avait pas réfléchi à quoi pourrait bien servir cet emprunt. Bien sûr, il nous a dit, en bon démocrate adepte du dialogue social, qu'il ne voulait pas décider seul. D'ailleurs, notre président ne nous avait-il pas dit que lorsqu'il serait président, le rapport Camdessus serait son livre de chevet? Pourtant "le doute en moi s'est immiscé". Cela fait plus de deux ans que notre président est au pouvoir, cela fera bientôt un an que la crise a montré le bout de son nez. Depuis tout ce temps, le président flanqué de tous ses conseillers, spéciaux ou non, ne serait pas en mesure de déterminer les priorités, les objectifs de sa politique économique et sociale? Je ne peux malgré tout pas y croire. Cela d'autant que me revient en mémoire les paroles de notre Premier ministre qui lors de la campagne présidentielle nous avait affirmé qu'il avait eu tout le temps nécessaire, n'étant pas ministre du gouvernement Villepin, pour déterminer les priorités de son action ainsi que les réformes qui feraient de notre pays un des leaders du monde. Je me souviens qu'à l'époque j'en avais eu le vertige.

Et puis l'espoir est revenu lorsque j'ai appris que monsieur Henri Guaino allait intervenir à la radio. Une des fonctions de ce conseiller spécial est d'expliquer, de traduire, de préciser la parole présidentielle. J'étais donc persuadé que monsieur Guaino allait extirper le doute de mon esprit. Que nenni. Usant d'une syntaxe par moment approximative, il me sembla peu sûr de lui, brouillon, le tout souligné par un incessant raclement de gorge qui traduisait son embarras à exprimer une pensée claire et convaincante. Il mania avec aisance le qualificatif d'idiot qu'il distribua avec générosité. Je le sentais agacé par les questions du journaliste de service. L'enseignement que je tirais de ses propos était qu'il n'avait pas la moindre idée de ce que pourrait financer l'emprunt. La charrue avait été mise avant les boeufs

Comme le disait notre président à propos de l'action de son Premier ministre, un peu de méthode ne nuirait pas. Je garde malgré tout espoir, persuadé que nous finirons bien par les trouver ces sacrées priorités.

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