mercredi 5 août 2015

Dur comme



J'allais écrire "Dans notre vie" mais réflexion faite, je vais m'en tenir à la mienne. Ma vie est composée de constantes. Des constantes de toute nature. Des plus communément partagées aux plus intimes et que l'on imagine personnelles. Je ne vais pas cette fois-ci entrer dans les détails tout en me concentrant sur un détail. J'utilise ce mot avec prudence. Ce détail est un verbe. Le verbe faire. Cela fait longtemps que je veux écrire à son sujet et allez savoir pourquoi j’ai toujours repoussé à plus tard. Alors pourquoi maintenant et pas plutôt plus tard ? De fait, le vase était plein. Dès ma plus tendre enfance, a-t-elle été si tendre, ma vie a été traversée par le verbe faire et ce qui gravite autour. A titre d'exemple : mais qu'est-ce que tu fais, est-ce que tu l'as fais, tu comptes le faire quand, qu'est-ce qu'on va faire de toi, t'as pas mieux à faire, c'est pas moi qui vais le faire, t'as pas fini de faire l'andouille, fais attention et tant d'autres. Pour certains de nos contemporains, faire est un idéal de vie. Faire c'est vivre et inversement. Nous en connaissons tous. Pour ce qui me concerne, j'ai un collègue de bureau qui fait partout et tout le temps. Il ne part pas en vacances, il ne visite pas, il ne se promène pas, il ne mange pas mais il a fait l'Espagne, il a fait l'Italie, il a fait le musée du Louvre, il a fait l'exposition Picasso, il a fait les Alpes à pieds, il a fait la traversée du Quercy, il s'est fait un couscous, il a fait un gueuleton. Et il veut toujours savoir ce que tu as fait pour pouvoir te dire "Moi aussi je l'ai fait." Ainsi, l'autre matin, découvrant ma bouille bronzée, il en conclut finement que je reviens de vacances. Je vous épargne tous les poncifs préliminaires pour en venir, enfin, aux faits. Il me demande où je suis allé. Je lui donne l'information et là c'est un festival de est-ce que t'as fait ci, est-ce que t'as fait ça? A chaque fois je lui réponds non et je sens bien qu'il a envie de me dire "Mais qu'est-ce que t'as foutu?" Je lui réponds même s'il ne m'a pas posé la question la question.
"Tu sais Robert, je préserve son anonymat, si je pars en vacances c'est pour ne rien faire. Je ne fais pas de visite, je ne fais pas de musée, je ne fais pas de découverte, tout ce qui est typique m'emmerde, je ne fais pas connaissance avec l'autochtone, je ne fais aucun effort, je ne m'intéresse à rien. Je vais même te dire, je ne fais tellement rien que je n'ai aucun souvenir de vacances, c'est à peine si je me souviens où je suis allé. Et quand je te dis rien, c'est que je n'ai vraiment rien fait. Et pourtant y avait à faire. Rien que sur la plage que je voyais de ma chambre, il y avait des centaines de nanas avec autant de chattes offertes entre des cuisses écartées et le double de nibards qui s'étalaient impudiques et luisants. Et bien aussi incroyable que ça puisse paraître, je ne m'en suis pas fait une seule. Je vais te dire, ça ne me faisait même pas bander. Je ne me suis même pas fait une petite branlette. Il faut que tu saches qu'en règle générale, dans la vie je ne fais rien et que je ne fais rien de ma vie. Alors évite de me faire chier avec tes questions".
Il est sorti du bureau sans un mot.
 

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