mercredi 3 août 2011

Il est temps (4)

J’essayais de faire comme si il n’existait pas, mais il ne l’entendait pas ainsi. Si sa décrépitude s’était déroulée en toute discrétion, en silence, je ne m’y serais pas opposé. Je l’aurais même accompagné avec compassion et sollicitude. Mais cette dégénérescence se déroulait au vu et au su de tous avec une absence totale de pudeur, de fierté. Aux yeux des autres, de tous ces étrangers que je croisais chaque jour, je n’étais qu’un corps harponné par la vieillesse, usé par le temps comme les vagues qui s’écrasent contre un rocher qui finira sous forme de grains de sable. Même cachés sous des vêtements, les symptômes transparaissaient. Une démarche qui hésitait, un regard qui semblait se perdre comme à la recherche d’une absence, un visage qui offrait l’apparence d’un puzzle mou qui aurait été oublié dans une arrière-boutique. Ce corps qui maintenant échappait à ma volonté, n’avait de cesse que de s’imposer à moi pour devenir mon unique préoccupation, mon obsession. Je m’étais rendu compte qu’il était en passe de réussir. Il commençait à exercer une certaine fascination. J’en pris conscience un matin dans la salle de bain.

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