mardi 18 février 2014

Le tout premier (fiction)

J'ai rassemblé mes souvenirs, tous mes souvenirs. J'avais le sentiment qu'il n'en manquait pas un seul. Pour certains, je suis allé les rechercher très loin. Rien ne dit qu'ils soient tous complets. Quelques morceaux ont pu se perdre en route mais en tout cas, même incomplets, ils recèlent l'essentiel. Il est possible que ma mémoire ait fait de la rétention mais ce n'est certainement pas sans raison. Je suis persuadé que ma mémoire me veut du bien. Une fois rassemblés, je les ai triés. Cette phase s'est révélée complexe. Après quelques hésitations, j'ai opté pour la chronologie. Étant un esprit simple, je privilégie la linéarité. Combien de fois me suis-je perdu dans des romans dans lesquels s'entremêlaient passé et présent. D'une certaine façon, mon souci principal a été de déterminer quel était mon premier souvenir. Si je prends l'exemple de ma naissance, ma mère me l'a racontée mais est-ce pour autant un de mes souvenirs? Une question en entraînant une autre, je me suis demandé ce qu'était un souvenir. Un épisode de ma vie avec un début et une fin. Une sorte de nouvelle cérébrale. Le souvenir d'un parfum est-il réellement un souvenir? J'ai coupé court et me suis concentré sur la recherche du premier. J'ai fini par le trouver. J'ai décidé que c'était le premier. Il y avait tout lieu de le croire. Alors pourquoi ce rassemblement de souvenirs? Dans un premier temps, j'avais l'intention de raconter ma vie. J'étais persuadé que cela ne viendrait à l'idée de personne d'autre. Je dis cela sans amertume. Et puis en me racontant, j'avais l'espoir d'apprendre à me connaître, de découvrir qui j'étais pour autant que je sois décidé à ne rien omettre. Moi était un sujet qui m'intéressais. Bien sûr, ma vie ne pouvait se résumer à une succession de souvenirs, quand bien même ils pourraient être qualifier de passionnants. Je décidai pourtant de commencer par le premier. J'étais persuadé que je finirais par découvrir le point commun entre eux. Même si cela n'apparaissait pas au premier coup d’œil, le désordre de ma vie répondait à quelque chose que j'étais encore incapable de définir, mais je sentais une puissance qui me guidait.   

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