vendredi 27 septembre 2013

Biche, oh ma...

L'autre jour je suis allé courir. Au détour d'un virage je découvre une biche. J'ai remarqué que le détour est un lieu d'où l'on découvre beaucoup de choses. Au détour d'une phrase, on découvre un écrivain. Au détour d'une bouche on découvre un plaisir. Au détour de sa vie on se découvre. Donc, je stoppe ma course pour ne pas effaroucher la biche. Il ne faut jamais effaroucher la biche et ce quelles que soient les circonstances. Nous nous observons, surtout elle. Elle me regarde et seules ses oreilles bougent. Je sais que si je fais un pas, elle va partir. Alors j'attends. Ce qui est un bon prétexte pour reprendre mon souffle. Il va pourtant falloir que je mette à nouveau un pied devant l'autre. Le tout c'est de savoir quand. Maintenant, plus tard? Attendre que la biche quitte le chemin pour s'enfoncer dans le bois? La situation est figée mais demeure une incertitude. Je ne sais pas comment cela va se terminer. Ce dont je suis certain, c'est que ce n'est pas elle qui fera le premier pas vers moi. J'ai bien conscience qu'il va me falloir débloquer la situation sinon elle risque de s'enliser. Je pourrais bien sûr faire demi tour mais je n'aime pas reculer et ce pratiquement quelles que soient les circonstances. Il faut avant tout que j'évite la crispation. Nous avons établi un équilibre mais qui demeure précaire. Ce qui me préoccupe c'est que je ne suis pas sûr qu'elle ait pris conscience des enjeux. Un peu à regret je décide de faire un pas, un petit pas. Je repose à peine le pied tout en continuant à la regarder. Ses oreilles cessent de bouger après s'être tournées dans ma direction. Je deviens l'unique objet de son attention. Je suis passé d'objet de curiosité à menace. C'est du moins ce que j'imagine. Je vais reprendre ma course et elle va disparaître. Je fais un autre pas vers elle. Elle me quitte des yeux et entre dans le sous-bois. Mais contrairement à ce que j'imaginais, elle le fait avec douceur. Il est vrai qu'avec mes petites jambes musclées, je ne risque pas de la rattraper. Peut-être imperceptiblement plus aérien, je reprends ma course. 

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